GIORNALE DI MEDICINA. Tomo Quarto. In Venezia. Appresso Benedetto Milocco in Merceria. 1766. Con licenzia de’ superiori, e privilegio. In-4, vélin, double filet d’encadrement et fleuron d’angle dorés, dos orné de même, pièce de titre bordeaux, tranches dorées (reliure de l’époque). 2 ff. et 424 pages dont un index pour les sujets traités et les auteurs. Texte sur deux colonnes. Une erreur de pagination (89 notée 93). 240×167 mm. Dorures un peu ternies, mais bel exemplaire.

650 euros

La persistance du questionnement sur le vampirisme.

Quatrième année de ce Journal de Médecine imprimé à Venise et publié à partir de 1761, qui rassemble de nombreux articles parus dans les journaux locaux de la Vénétie. Notre volume réunit les livraisons I (1er juin 1765) à LII (14 juin 1766).

Celle du 30 novembre 1765 contient aux pages 213-215 une longue lettre en italien sur les vampires : « Lettera scritta all’ Autore della Gazzetta Letteraria di Berlino, intorno ai Vampiri ». Elle occupe environ quatre colonnes. Comme l’indique manifestement le titre, cette lettre a initialement été envoyée à un journal berlinois, qui l’a publiée.

On trouve par ailleurs dans le numéro du 7 décembre de notre publication une réponse à cette lettre : « Riflessioni sopra la Lettera intorno ai Vampiri, inserita nel Foglio antecedente » (pages 220-221 ; un peu plus de trois colonnes).

L’auteur du premier texte rappelle les événements ayant conduit en 1731 à l’intervention de l’armée autrichienne et au rapport Flückinger. Puis il relate ceux de 1736 et raconte que, passant par Gradisca et Medreyga [Medwegya], il s’est procuré grâce à un « gentilhomme esclavon » qui l’entretenait beaucoup de vampirisme, les procès-verbaux constatant ces événements. Il conclut en exprimant un point de vue « classique » : « je ne suis rien moins que crédule mais il me semble qu’on ne peut refuser de croire une chose qui est de notoriété publique, attestée juridiquement et par des gens de probité, vu surtout qu’il y a tant d’exemples réitérés et tous également constatés. Je laisse aux Philosophes à rechercher les causes capables de produire des événements si peu naturels » [traduit de l’italien par Google Translate, comme ce qui suit].

L’auteur de l’article de décembre explique : « si le vampirisme n’est pas une chimère, ce ne peut être qu’une œuvre diabolique. Quand bien même on supposerait l’apparition des esprits, on ne concevra jamais comment un fantôme pourra sucer réellement le sang des victimes ; ni comment ce sang sucé pourra être porté par cet esprit et pénétrer dans l’intérieur d’un tombeau pour aller remplir et nourrir un corps mort renfermé dans ce sépulcre ; ni comment ce corps privé de tout air extérieur pourra conserver une respiration naturelle, et néanmoins être immobile et mort, comme on le dit des vampires ; toutes choses qui dans l’ordre de la nature ne peuvent passer que pour des absurdités : si donc tout ce qu’on raconte de ces vampires est véritable, cela ne peut se faire que par un moyen surnaturel, et comme nous avons dit, diabolique, puisque l’œuvre en est malfaisante. » Sont abordés ensuite plusieurs cas réels qui ne relèvent pas du vampirisme, qui montrent que l’imagination, un mauvais moral, peuvent conduire des gens à croire à des apparitions. « On a vu des hommes croire être devenus chiens et aboyer comme des chiens. Notre vieux Montaigne cite nombre d’exemples de ces étranges effets de l’imagination. » Il fait enfin le parallèle avec la croyance aux vampires et conclut : « Quand on aura examiné, approfondi et discuté toutes ces questions, on verra peut-être que la première idée du vampirisme est sortie du cerveau d’une vieille femme ou d’une nourrice. »

Nos deux textes ont été publiés peu avant, en français, dans la Gazette Salutaire (31 octobre et 7 novembre). Le premier est paru seul dans le numéro de la première quinzaine de novembre de la Gazette des Gazettes, ou Journal politique. Ces interventions et leur diffusion dans trois langues différentes montrent en tout état de cause que le vampirisme suscitait encore, à cette époque tardive, un certain questionnement des européens occidentaux – un questionnement non exempt, dans le cas présent, d’une forme de crédulité, ce qui n’est pas le cas le plus habituel.

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