Vampirisme
Il est dâabord question dans cette introduction des conditions qui ont prĂ©sidĂ© au dĂ©veloppement de la croyance au vampire, des circonstances dans lesquelles, plusieurs siĂšcles aprĂšs, les EuropĂ©ens occidentaux ont appris lâexistence de cette figure malĂ©fique et, enfin, de la façon dont ils lâont perçue. Nous nous attachons particuliĂšrement au cas de la France et insistons dâautre part sur le fait que lâimmense notoriĂ©tĂ© de ce mort-vivant sâexplique davantage par un concours de circonstances que par ses caractĂ©ristiques, trĂšs proches dâailleurs de celles dâautres revenants, oubliĂ©s quant Ă eux depuis trĂšs longtemps.
Nous nous intĂ©ressons ensuite Ă la littĂ©rature que le mythe a inspirĂ©e, jusquâaux annĂ©es 1970 environ, en privilĂ©giant les cas français et anglo-saxon.
La derniÚre partie consiste en une brÚve description des livres présentés sur ce site, complétée par des remarques sur le thÚme du vampire dans la bibliophilie.
La liste des principaux ouvrages que nous avons utilisĂ©s dans le cadre de nos commentaires sur le vampirisme figure Ă la suite de cette introduction. D’autres titres sont mentionnĂ©s dans les fiches.
Les « revenants en corps », le vampire
Câest au XVIIIe siĂšcle, Ă la suite dâincidents dans une partie reculĂ©e des Balkans, en Serbie, que lâEurope occidentale dĂ©couvre le vampire. Cet ĂȘtre malĂ©fique nâest pas dâun genre nouveau en ce sens que ses attributs le rattachent Ă une catĂ©gorie particuliĂšre de morts malfaisants, frĂ©quemment qualifiĂ©s de « revenants en corps » en raison de leurs particularitĂ©s. Distincts des fantĂŽmes et des spectres des fables et des lĂ©gendes mĂ©diĂ©vales, prĂ©cisĂ©ment identifiĂ©s par leur caractĂšre incorporel, ces dĂ©funts mortifĂšres dont les corps, rĂ©putĂ©s imputrescibles, paraissent habitĂ©s par une seconde vie, se manifestent sous forme humaine ou animale aux vivants et peuvent aussi exercer une influence malĂ©fique depuis le tombeau.
En dehors du vampire, le plus connu des revenants en corps est le broucolaque grec ; nĂ© de la croyance Ă lâincorruptibilitĂ© des cadavres dâexcommuniĂ©s, il est mentionnĂ© frĂ©quemment dans des rĂ©cits de voyageurs, Ă partir du dĂ©but du XVIe siĂšcle. On peut citer de mĂȘme les morts mĂącheurs, qui dĂ©voraient leur linceul, voire leurs bras, et Ă©mettaient du fond de leur tombeau des sons semblables aux grognements des porcs. SignalĂ©s Ă partir de 1345, ils firent lâobjet dâun traitĂ© allemand en 1679. Probablement, la croyance Ă un tel phĂ©nomĂšne Ă©tait-elle liĂ©e, au moins en partie, aux « inhumations prĂ©cipitĂ©es ». Celles-ci se produisaient notamment lors des pĂ©riodes de peste durant lesquelles on se dĂ©barrassait hĂątivement des corps couverts de bubons, mais Ă©galement en temps normal â pendant longtemps en effet (jusqu’au XXe siĂšcle), on ne savait pas identifier avec certitude les signes de la mort et il arrivait donc que des gens fussent enterrĂ©s vivants. Il faut aussi Ă©voquer le cadaver sanguisugus anglais, dont plusieurs attaques, ainsi que les exhumations, mises en piĂšces ou crĂ©mations consĂ©cutives, sont relatĂ©es dans des chroniques rĂ©digĂ©es vers la fin du XIIe siĂšcle, et les revenants mentionnĂ©s vers la mĂȘme Ă©poque dans des sagas islandaises. Il existe Ă©galement quelques cas dâindividus isolĂ©s, nâappartenant Ă aucune de ces familles.
DĂ©veloppement de la croyance au vampire : le contexte, les premiĂšres traces
Le dĂ©veloppement de la croyance au vampire pourrait avoir Ă©tĂ© favorisĂ© par la conversion des Slaves au christianisme vers la fin du premier millĂ©naire et plus prĂ©cisĂ©ment par la pĂ©riode transitoire qui suivit : plusieurs centaines dâannĂ©es durant lesquelles les populations furent « tiraillĂ©es » entre le message spirituel de lâenseignement chrĂ©tien et leurs rites et croyances paĂŻens, fondĂ©s sur le culte de la nature et des dĂ©funts, auxquels elles ne renonçaient pas. [1]
Ă cet Ă©gard, le vampirisme prospĂ©ra le plus dans les territoires dont la vie religieuse Ă©tait administrĂ©e par lâĂglise orthodoxe, qui se rĂ©vĂ©la moins efficace dans lâĂ©radication des vestiges des rites anciens que lâĂglise romaine. [2]
Selon les croyances des populations, les morts menaient quasiment une existence physique dans lâau-delĂ . « Comme les divinitĂ©s, ils Ă©taient censĂ©s participer aux abondances des rĂ©coltes ou aux famines, montrant ainsi leur bienveillance ou leur mĂ©contentement. Fondus aux forces de la nature, ils occupaient dans lâenvironnement des Slaves paĂŻens, une place Ă part entiĂšre. » [3]
Sous cette hypothĂšse, câest le fait pour lâĂglise chrĂ©tienne dâimposer lâinhumation systĂ©matique des dĂ©funts, qui constitua vraisemblablement le facteur dĂ©terminant dans la cristallisation du concept de vampire.
Les paysans slaves qui, jusquâalors, pratiquaient majoritairement la crĂ©mation, Ă©taient dĂ©sormais confrontĂ©s Ă la prĂ©sence de trĂ©passĂ©s se putrĂ©fiant Ă proximitĂ©, sous terre. Cette prĂ©sence Ă©tait dâautant plus inquiĂ©tante que les divers phĂ©nomĂšnes naturels entrant en jeu dans le processus de dĂ©composition, notamment le fait que celui-ci peut ĂȘtre long dans certains cas, Ă©chappaient sans doute Ă leur entendement. [4]
Ainsi, ce changement radical dans les coutumes funĂ©raires modifia certainement la façon de considĂ©rer les morts et fit naĂźtre des reprĂ©sentations angoissantes des cadavres. Peut-ĂȘtre les foules, ignorant les grands principes de lâenseignement chrĂ©tien, particuliĂšrement abstrait comparativement Ă leurs croyances paĂŻennes, virent-elles lâimage des revenants en chair se profiler derriĂšre le mystĂšre de la rĂ©surrection ? [5] Comme lâĂ©crit Daniela Soloviova-Horville, « Nous pouvons ainsi rĂ©sumer notre hypothĂšse : câest le cadavre enseveli qui a crĂ©Ă© le vampire. » [6]
Concernant les traces Ă©crites relatives au vampire, la forme ancienne du mot, upyrâ, apparaĂźt furtivement en 1047, dans un manuscrit russe. Toutefois, les informations sont insuffisantes pour que lâon puisse savoir ce quâil est censĂ© reprĂ©senter et il en est de mĂȘme dans le cas des autres manuscrits antĂ©rieurs au XIVe siĂšcle qui, au demeurant, sont trĂšs rares. « Cependant, malgrĂ© le peu de tĂ©moignages Ă©crits, on ne peut douter de lâexistence de croyances relatives Ă la malfaisance des morts. »
Dans le cas du premier millĂ©naire, cette pĂ©nurie dâinformations sâexplique par le fait que les Slaves ne disposaient pas encore de leur propre Ă©criture. Par la suite, elle est due Ă lâattitude rĂ©probatrice de lâĂglise : les croyances ayant trait aux morts dangereux, vestiges dâune religion primitive destinĂ©e Ă ĂȘtre supplantĂ©e, furent le plus souvent entourĂ©es de silence. [7]
Quoi quâil en soit, les philologues estiment que vers le XVe siĂšcle (alors que la tradition orale vĂ©hiculait dĂ©jĂ un grand nombre de rĂ©cits de morts malfaisants), le mot upyrâ muta dans les terres serbes, en donnant naissance Ă vampir [8] â dont la premiĂšre mention Ă©crite pourrait dater de 1725. Au sujet de cette date, voir infra.
Notons que des fouilles archĂ©ologiques ont permis de dĂ©couvrir dans des pays slaves des squelettes dont les pieds avaient Ă©tĂ© amputĂ©s, ou porteurs dâune grosse pierre sur la rĂ©gion cardiaque, ou encore clouĂ©s aux cercueils⊠Ces mutilations, dont on peut lĂ©gitimement envisager quâelles tĂ©moignent dâune certaine inquiĂ©tude envers les morts en question, pourraient ainsi ĂȘtre liĂ©es au dĂ©veloppement des croyances aux vampires ; elles suggĂšrent mĂȘme que celles-ci sont peut-ĂȘtre antĂ©rieures Ă la christianisation, puisque certains squelettes sont datĂ©s des IVe-Ve siĂšcles. Cela dit, la plus grande prudence sâimpose lorsquâil sâagit dâinterprĂ©ter de telles dĂ©couvertes.
Croyances « vampiriques » et crainte de la malfaisance des morts
Sâil est vrai que la christianisation des Slaves joua un rĂŽle majeur dans lâĂ©mergence du vampire, il nâen demeure pas moins que lâon ne saurait discuter de ce mort malĂ©fique sans Ă©voquer ses racines les plus profondes, des racines trĂšs lointaines quâil partage avec dâautres figures inquiĂ©tantes, ailleurs dans le monde et Ă diverses Ă©poques.
Comme lâexplique en effet Robert Baudry, la croyance aux vampires est fondĂ©e sur un sentiment qui « meut toutes les sociĂ©tĂ©s âarchaĂŻquesâ : la crainte rĂ©vĂ©rentielle des morts. » Ainsi, « âles morts ne sont pas mortsâ [âŠ] Les ancĂȘtres dĂ©funts se transforment en gĂ©nies domestiques, en âmĂąnesâ attachĂ©s au foyer des vivants, esprits tantĂŽt tutĂ©laires, pour leurs proches et pour leurs descendants, tantĂŽt malveillants, vindicatifs sâils se croient nĂ©gligĂ©s. [âŠ] Aussi, pour conjurer les possibles vengeances de ces ombres errantes, leur rendra-t-on un culte. »
Câest peut-ĂȘtre en MĂ©sopotamie, plus de deux-mille ans avant notre Ăšre, que cette crainte des morts « tourna le plus tĂŽt en visions vampiriques », avec la croyance « Ă des dĂ©mons incubes qui, la nuit, visitaient les femmes endormies, se couchaient sur leur sein et violaient leur corps. » (les hommes quant Ă eux Ă©taient visitĂ©s par « âde succubes dĂ©monsâ »). [9]
Plus prĂšs de nous, les Anciens Romains redoutaient les lĂ©mures et les larves, des esprits malfaisants de morts nâayant pas reçu de sĂ©pulture ou ayant pĂ©ri dâune maniĂšre violente ; ils Ă©taient censĂ©s provoquer les crises dâĂ©pilepsie, lâapoplexie ou la stĂ©rilitĂ© chez les femmes. Les populations les amadouaient en cĂ©lĂ©brant une fĂȘte au mois de mai (entre autres pratiques Ă©quivalentes, les Slaves, pour leur part, joignaient aux restes de leurs dĂ©funts ce qui pouvait leur ĂȘtre utile dans leur nouvelle vie â des outils par exemple).
En somme, le revenant serbe « nâest jamais quâun des nombreux avatars dâun imaginaire de croyances en des morts qui viennent hanter les vivants, imaginaire qui, Ă travers le monde, a revĂȘtu des formes multiples ». [10]
Pour cette raison dâailleurs, le terme « vampire », censĂ© par dĂ©finition lui ĂȘtre strictement rĂ©servĂ©, est habituellement Ă©tendu (parfois abusivement) Ă diverses autres figures malĂ©fiques.
Les prĂ©mices de lâirruption du vampire en Europe occidentale
Jusquâau XVIIIe siĂšcle, aucun des revenants en corps Ă©voquĂ©s ci-dessus, dont certains avaient pourtant des caractĂ©ristiques trĂšs proches de celles du vampire, nâavait retenu lâattention dâun public occidental abreuvĂ© depuis le Moyen Ăge dâhistoires de morts dangereux.
En mars et mai 1693, parurent dans le Mercure Galant deux articles dans lesquels il Ă©tait question dâun revenant en corps sĂ©vissant en Pologne et principalement en Russie [11] : lâUpierz, assimilable au futur vampire, sauf pour ce qui concerne la façon de prĂ©lever le sang, qui Ă©tait le fait du dĂ©mon.
On pouvait lire : « [âŠ] on pretend que le Demon sort de ce Cadavre en de certains temps, depuis midy jusques Ă minuit, aprĂ©s quoy il y retourne et y met le sang quâil a amassĂ©. [âŠ] Le Demon qui sort du Cadavre, va troubler la nuit ceux avec qui le mort a eu le plus de familiaritĂ© pendant sa vie, et leur fait beaucoup de peine dans le temps quâils dorment. Il les embrasse, les serre, en leur reprĂ©sentant la figure de leur Parent ou de leur ami, les affaiblit de telle sorte en sucçant leur sang pour le porter au Cadavre, quâen sâĂ©veillant sans connoistre ce quâils sentent, ils appellent au secours. Ils deviennent maigres et attenuez, et le Demon ne les quitte point, que tous ceux de la famille ne meurent lâun aprĂšs lâautre [âŠ] on leur ouvre le cĆur et il en sort quantitĂ© de sang. On le ramasse et on le mĂȘle avec de la farine pour la pĂȘtrir et en faire ce pain, qui est un remede seur pour se garantir [âŠ] » (article de mai)
Pour la premiĂšre fois, semble-t-il, il Ă©tait question dans un Ă©crit, de morts qui suçaient le sang de leurs victimes ou bien qui les attaquaient dans le but dâabsorber leur substance vitale. [12]
Dans la livraison de fĂ©vrier 1694, un certain Marigner analysa les faits de lâannĂ©e prĂ©cĂ©dente dans une Ă©tude dont la premiĂšre partie avait Ă©tĂ© publiĂ©e le mois prĂ©cĂ©dent. [13]
Cet essai constitue la « premiĂšre exĂ©gĂšse du vampirisme au sens qui se prĂ©cise alors, oĂč nous lâentendons maintenant. ExĂ©gĂšse ni rationaliste ni thĂ©ologique, mais proprement âmagiqueâ, dans la mouvance paracelsienne. » [14]
Enfin, la mĂȘme gazette publia en novembre la rĂ©action dâun lecteur Ă lâĂ©tude de Marigner. [15]
Fait remarquable, il subsiste un tĂ©moignage trĂšs intĂ©ressant, plus ancien que ceux du Mercure Galant et assez rarement Ă©voquĂ© : une lettre datĂ©e de 1659, de Pierre Desnoyers, lâauteur de lâarticle de mai 1693, qui dĂ©crit une « maladie en Ukraine », appelĂ©e Upior en langue ruthĂ©nienne et Friga, en polonais. On constate ainsi lâexistence, dĂšs cette Ă©poque, de croyances proches de celles dĂ©crites par le Mercure.
Il nâĂ©tait cependant pas (encore) question dans cet Ă©crit de phĂ©nomĂšne dĂ©moniaque, ni dâabsorption de sang. [16] Bien quâimpressionnants, les articles du Mercure Galant nâattirĂšrent pas, eux non plus, lâattention : ils semblent nâavoir suscitĂ© aucun commentaire autre que celui que cette gazette publia en novembre 1694.
Paradoxalement, peu de temps aprĂšs (quelques dizaines dâannĂ©es), le vampire, qui ne prĂ©sentait aucun caractĂšre rĂ©ellement inĂ©dit par rapport Ă ses prĂ©dĂ©cesseurs, allait faire naĂźtre un dĂ©bat sans prĂ©cĂ©dent. [17]
Il fallut bien sĂ»r, pour que les Ă©vĂ©nements prissent une telle tournure, des circonstances trĂšs particuliĂšres : celles-ci dĂ©coulĂšrent indirectement dâun fait politique, le traitĂ© de paix de Passarowitz qui plaçait Ă partir de 1718 la Serbie sous administration autrichienne. Ce changement entraĂźna la mise en place sur ce territoire dâun important dispositif militaire : il Ă©tait hors de question pour les hautes autoritĂ©s autrichiennes de surveiller de loin ce pays nouvellement acquis.
Le premier fait notable se produisit en 1725 dans ce pays sous surveillance, quand le nommĂ© Peter Plogojovitz revint dix semaines aprĂšs sa mort dans son village de Kisolova, oĂč il apparut Ă plusieurs personnes, dont sa femme Ă laquelle il rĂ©clama ses souliers. Les villageois lâaccusaient, par ailleurs, dâavoir provoquĂ© le dĂ©cĂšs de neuf habitants en se couchant sur eux pendant leur sommeil.
LâarmĂ©e, soucieuse de prĂ©venir tout trouble intĂ©rieur, dĂ©pĂȘcha un officier impĂ©rial du nom de Frombald pour enquĂȘter. SollicitĂ© par les habitants, ce dernier assista en compagnie du pope du village Ă lâexhumation du mort : son « visage, les mains et les pieds, et tout le corps, Ă©taient tels quâils nâauraient pu ĂȘtre plus parfaits de son vivant. Ce nâest pas sans surprise que jâai aperçu dans sa bouche un peu de sang frais, lequel, selon ce quâon racontait gĂ©nĂ©ralement, Ă©tait le sang quâil avait sucĂ© du corps de ceux quâil avait fait mourir. [âŠ] [Les villageois, pris de terreur et en colĂšre, taillĂšrent en toute hĂąte un pieu qui fut appliquĂ© sur le cĆur et lâon vit] une grande quantitĂ© de sang, tout frais, sortir de ce cĆur, des oreilles et de la bouche [âŠ]. Finalement ils brĂ»lĂšrent, pour le rĂ©duire en cendres, ce corps dont il avait Ă©tĂ© souvent question, et ils le firent dans ce cas-ci selon leur maniĂšre habituelle de procĂ©der. VoilĂ donc ce dont jâinforme lâhonorable administration, et lâhumble et obĂ©issant serviteur que je suis se permet de la prier, au cas oĂč une faute aurait pu ĂȘtre commise en cette affaire, de ne me pas lâimputer Ă moi-mĂȘme, mais Ă ces gens qui, pris de terreur, sâĂ©taient trouvĂ©s comme hors dâeux-mĂȘmes » [18].
On pouvait lire aussi, dans ce rapport qui fut publiĂ© le 21 juillet 1725 dans un grand journal viennois : « dergleichen personen (so sic vampyri nennen) », câest-Ă -dire « de telles personnes (quâon appelle vampires) » : ce fut lĂ , semble-t-il, la premiĂšre apparition du mot sous forme Ă©crite, et le premier contact dâEuropĂ©ens occidentaux avec un vampire classique. A priori, cette nouvelle ne parvint pas en France.
DÚs le mois de septembre, le philosophe allemand Michael Ranft prononça à Leipzig une dissertation publique consacrée au cas de Plogojovitz. Celle-ci fut imprimée peu aprÚs, puis rééditée, fortement augmentée, en 1728, mais il semble que Ranft fut longtemps seul à se questionner. [19]
Le Visum et Repertum ; naissance du mythe. Le cas trĂšs particulier de lâAllemagne
Les années suivantes furent assez calmes, marquées seulement par quelques incidents isolés. [20]
Câest en 1732, Ă lâoccasion dâun nouveau cas dans un village serbe, que le mythe vit le jour, presque brutalement. Tout commença Ă la fin de lâannĂ©e 1731, lorsque les habitants de Medwegya sollicitĂšrent les militaires autrichiens en poste dans la rĂ©gion. Une premiĂšre observation, conclue par un rapport, fit apparaĂźtre que treize personnes, mortes en quelques semaines, Ă©taient devenues vampires (orthographiĂ© vampyr). Le mĂ©decin autrichien consultĂ©, un certain Glaser, nâayant dĂ©celĂ© aucune maladie contagieuse, refusa de trancher sur la question. Son rapport, quelque peu confus mais passablement inquiĂ©tant, souligne la terreur des gens, qui se regroupaient dans une maison pour y passer la nuit. [21]
Lâaffaire en resta momentanĂ©ment lĂ . Peu aprĂšs, de nouvelles morts mystĂ©rieuses affolĂšrent les villageois et une seconde investigation fut menĂ©e au dĂ©but de lâannĂ©e 1732. DirigĂ©e par Johann FlĂŒckinger, un chirurgien militaire ayant pour consigne de sâattacher avant tout Ă rĂ©aliser une enquĂȘte mĂ©dicale Ă partir de lâexhumation et de lâexamen des cadavres, elle donna lieu Ă un nouveau rapport, le Visum et Repertum.
On y apprenait quâen 1727, un homme, Arnold Paole, qui avait Ă©tĂ© molestĂ© de son vivant par un vampire, en Ă©tait devenu un aprĂšs sa mort. Les villageois lâavaient exhumĂ©, ainsi que ses victimes ; tous avaient Ă©tĂ© exĂ©cutĂ©s, comme Plogojovitz en son temps. Lâaccalmie qui avait suivi avait durĂ© quelques annĂ©es. DâaprĂšs la rumeur, Arnold Paole avait attaquĂ© aussi du bĂ©tail et les personnes ayant mangĂ© de cette viande infectĂ©e Ă©taient devenues Ă leur tour des vampires aprĂšs leur mort.
Parmi les treize corps dĂ©terrĂ©s, dix furent identifiĂ©s comme ceux de vampires par la population. Dans le cas dâune jeune paysanne, Stanojka, qui, tandis quâelle dormait, avait Ă©tĂ© « serrĂ©e au cou » par un homme mort depuis plusieurs semaines, ils virent « clairement » sous lâoreille gauche « une marque bleue, par oĂč le sang avait coulĂ© [âŠ] Tous ses organes se trouvaient en parfait Ă©tat de conservation [âŠ] AprĂšs avoir pris acte de tout ce qui prĂ©cĂšde, on fit couper la tĂȘte de tous ces vampires par des bohĂ©miens de passage, on brĂ»la leur corps et on en jeta les cendres dans la Moravia, tandis que lâon replaçait dans leur cercueil les cadavres trouvĂ©s en Ă©tat de dĂ©composition. Jâaffirme, moi et les Unterfeldscherer qui mâont Ă©tĂ© dĂ©pĂȘchĂ©s, que toutes ces choses se sont passĂ©es telles que nous venons de les rapporter Ă Medwegya, en Serbie, le 7 janvier 1732 [âŠ] attestons avoir assistĂ© de nos propres yeux [âŠ] ce qui est ci-dessus, rapportĂ© au sujet des vampires, est vrai et sâest passĂ© en notre prĂ©sence. Notre signature en fait foi. » [22]
Ce « document extraordinaire », « sobre, descriptif, dĂ©taillĂ©, clair, et dâautant plus hallucinant », dont le sĂ©rieux et lâauthenticitĂ© Ă©taient garantis par la seule qualitĂ© de mĂ©decin militaire de son rĂ©dacteur, eut un Ă©norme retentissement immĂ©diat et fut dĂ©terminant relativement Ă la naissance du mythe. Il circula beaucoup, fut transmis dĂšs le mois de fĂ©vrier dans les cours de toute lâEurope Ă©clairĂ©e, dont la France, et Ă des institutions scientifiques germaniques, auxquelles on demanda de prendre position. [23]
Les populations y eurent accĂšs trĂšs rapidement, grĂące aux gazettes dont le lectorat ne cessait de croĂźtre et de se diversifier depuis leurs dĂ©buts au XVIIe siĂšcle ; une adaptation libre, assortie de commentaires Ă©crits dans un style alerte, vivant, parut ainsi dĂšs le 3 mars dans le Glaneur historique, une publication en langue française Ă lâaudience internationale, dirigĂ©e par Jean-Baptiste Le Villain de La Varenne, bĂ©nĂ©dictin dĂ©froquĂ© installĂ© en Hollande. Ce fut a priori la premiĂšre « vĂ©ritable » apparition du vampire dans un article en langue française (elle fut prĂ©cĂ©dĂ©e dâune courte communication dans le pĂ©riodique Relations VĂ©ritables ; nous y revenons plus loin)
Le journaliste insistait particuliĂšrement sur la soif de sang attribuĂ©e aux vampires. Il n’hĂ©sita pas Ă la qualifier de « phĂ©nomĂšne extraordinaire ». [24]
En Angleterre, le premier article fut publiĂ© quelques jours plus tard et, dĂšs le mois de mai, une revue utilisa le nom du mort-vivant dans un sens mĂ©taphorique (« Political vampyres »). On notera Ă©galement que lâinformation parvint rapidement aux Ătats-Unis (au plus tard le 5 juin, date Ă laquelle le Weekly Rehearsal of Boston en rendit compte).
Le dĂ©bat qui sâensuivit fut essentiellement allemand : durant la seule annĂ©e 1732, il parut en plus du Visum et Repertum une dizaine de traitĂ©s dĂ©veloppant des explications de type rationaliste, thĂ©ologique ou bien « magique » et une vingtaine dâarticles, certains dans de trĂšs sĂ©rieux pĂ©riodiques scientifiques et philosophiques.
Cette effervescence cessa rapidement : dĂšs 1733, les mentions dans la presse se firent beaucoup plus rares, tandis que les traitĂ©s commençaient de se rarĂ©fier â on nâen dĂ©nombre que deux au cours de cette annĂ©e. Cependant, une vingtaine de publications abordant le sujet ou sây consacrant parurent encore, au cours des dĂ©cennies qui suivirent. En 1734, Ranft, mĂ©content des mauvaises interprĂ©tations que l’on faisait de son ouvrage, en livra une troisiĂšme Ă©dition, fortement augmentĂ©e elle aussi, qui, selon Antoine Faivre, constitue sans doute lâĂ©tude la plus intĂ©ressante parue Ă cette Ă©poque [25].
Quelques nouveaux cas furent signalĂ©s aprĂšs 1734, mais ils dĂ©frayĂšrent relativement peu la chronique. En 1749, le pape BenoĂźt XIV prit position dans la deuxiĂšme Ă©dition de son livre sur les bĂ©atifications et les canonisations des saints (il n’avait pas discutĂ© du sujet dans la premiĂšre [1734-1738]). Comme d’autres avant lui, il insista sur les effets de l’imagination. En 1755, Ă la suite dâincidents en Haute-SilĂ©sie (trente exhumations Ă l’issue desquelles les bourreaux de plusieurs villes, mandĂ©s pour l’occasion, exĂ©cutĂšrent vingt cadavres de supposĂ©s vampires), l’impĂ©ratrice Marie-ThĂ©rĂšse publia une ordonnance recommandant « la plus grande prudence en matiĂšre de sorcellerie et de magie, surtout pour ce qui concerne la magia posthuma â dont le vampirisme fait partie. Despote Ă©clairĂ©e, elle fait diriger les sorciers vers l’asile au lieu d’encourager la construction de bĂ»chers. L’idĂ©e se rĂ©pand alors que les gens qui croient aux vampires relĂšvent de la mĂ©decine. » (A. Faivre) [26]
Ă la suite de ces Ă©vĂ©nements, lâimpĂ©ratrice demanda Ă Gerard Van Swieten, son mĂ©decin personnel, de faire la lumiĂšre sur l’affaire. Ce dernier rĂ©digea un rapport qui fait partie aujourd’hui des Ă©crits d’Ă©poque frĂ©quemment citĂ©s.
La réception du vampire en France
Revenons au Glaneur et au cas de la France : un deuxiĂšme article fut publiĂ© le 17 mars. Il y Ă©tait prĂ©cisĂ© que le journal avait reçu de nombreux courriers et quâune troisiĂšme communication destinĂ©e Ă expliquer les faits allait suivre « sans tarder ». Toutefois, lâintĂ©rĂȘt Ă©tait dĂ©jĂ retombĂ© puisque les explications en question ne furent fournies quâen avril 1733 (« Quoiquâil y ait dĂ©jĂ long tems que lâon ne parle plus, dans nos Provinces, des vampires [âŠ] »).
Entre-temps, en mai 1732, le Mercure de France avait proposĂ© Ă ses lecteurs une traduction du Visum et Repertum, beaucoup plus complĂšte, plus fidĂšle et non commentĂ©e, dont le titre, Wampirs, fait singulier et des plus extraordinaires, sâil est vrai, trahissait quand-mĂȘme une certaine perplexitĂ© face au caractĂšre Ă la fois Ă©trange et pourtant crĂ©dible du rapport [27]. Il Ă©tait indiquĂ© que Stanojka sâĂ©tait plainte dâavoir Ă©tĂ© « sucĂ©e au col » (et non pas « serrĂ©e »).
Le mort-vivant slave ne rĂ©apparut semble-t-il quâen 1736 [28], lorsque le numĂ©ro dâoctobre du Mercure historique et politique relata un cas prĂ©sentĂ© comme nouveau â curieusement, il pourrait sâagir en rĂ©alitĂ© de celui de Plogojovitz â et rĂ©imprima Ă cette occasion la quasi-totalitĂ© du premier article du Glaneur.
Il y eut cette fois quelques rĂ©actions. Le philosophe Boyer dâArgens, engagĂ© dans le combat contre la superstition, saisit lâoccasion et produisit en 1736 (ou 1737 ?) une analyse demeurĂ©e cĂ©lĂšbre dans la 125Ăšme « lettre juive » [29]. L’annĂ©e suivante, la BibliothĂšque Germanique Ă©voqua Ă©galement la question, et un mĂ©decin, Guillaume Rey, prononça une confĂ©rence Ă Lyon (sans la publier).
Ă notre connaissance, ce fut tout et le vampire retomba dans lâoubli. Deux nouvelles affaires furent toutefois signalĂ©es en juillet et septembre 1738 dans MĂ©moires historiques pour le siĂšcle courant, mais nous nâen avons trouvĂ© aucune trace ailleurs ; de plus les articles correspondants se rĂ©fĂšrent Ă peine aux Ă©crits antĂ©rieurs : « la ridicule fable des Vampires, qui fit tant de bruit il y a 4 ou 5 ans [âŠ] ».
Enfin, en 1741, Gilbert-Charles Le Gendre consacra une huitaine de pages au phĂ©nomĂšne dans son TraitĂ© historique et critique de lâopinion, un ouvrage sâattaquant aux erreurs et prĂ©jugĂ©s (le sujet est absent de lâĂ©dition de 1735).
En 1745, le vampire, orthographiĂ© « vampyr », fut mentionnĂ© dans le SupplĂ©ment au Dictionnaire historique et gĂ©ographique de Moreri ; la longue notice Ă©tait basĂ©e entiĂšrement sur lâarticle paru huit ans plus tĂŽt dans la BibliothĂšque Germanique. Le rĂ©dacteur prĂ©senta la succion du sang comme lâattribut principal du revenant. [30]
Il importe dâinsister sur le caractĂšre trĂšs rĂ©ducteur dâune telle caractĂ©risation, la vĂ©ritable spĂ©cificitĂ© du vampire rĂ©sidant avant tout dans ses racines culturelles et religieuses particuliĂšrement riches, briĂšvement Ă©voquĂ©es plus haut, et non dans ce rĂŽle de buveur de sang mis en avant dans ces imprimĂ©s, mais, selon D. Soloviova-Horville, secondaire dans lâimaginaire des populations slaves.
Cependant, les Occidentaux Ă©clairĂ©s, ignorants des particularitĂ©s des peuples concernĂ©s, quâils jugeaient « incultes » et « grossiers », nâĂ©taient pas disposĂ©s Ă explorer lâunivers symbolique de leurs croyances. [31]
Ce point de vue, relayĂ© par les autres dictionnaires, allait ĂȘtre dĂ©finitivement consacrĂ© aprĂšs quâen 1763, le grand naturaliste Buffon, dont lâĆuvre Ă©tait internationalement connue, eut choisi de dĂ©signer par le terme « vampire » une chauve-souris gĂ©ante qui se nourrit du sang des dormeurs, en prĂ©cisant de façon insistante, quant au sens quâil donnait au mot : « câest-Ă -dire, celui qui suce le sang [des hommes et des animaux endormis] ». [32]
Câest durant cette pĂ©riode, en 1746, que parut le cĂ©lĂšbre traitĂ© intitulĂ© Dissertations sur les apparitions des anges, des demons et des esprits. Et sur les revenans et vampires. De Hongrie, de Boheme, de Moravie et de Silesie [33] auquel l’auteur, le bĂ©nĂ©dictin Dom Augustin Calmet, avait commencĂ© de travailler cinq ans plus tĂŽt. Cet ouvrage, publiĂ© encore plus tardivement que lâanalyse de Boyer dâArgens, alors que la (trĂšs modeste) vague dâintĂ©rĂȘt française Ă©tait retombĂ©e depuis longtemps, connut rapidement trois rĂ©Ă©ditions (1749, 1751 et 1759) et trois traductions, allemande, anglaise et italienne ; il contribua ainsi Ă familiariser le public Ă la figure du vampire. [34]
Les milieux intellectuels et religieux ne furent pas convaincus par la mĂ©thode de Calmet, qui dĂ©clarait vouloir examiner les faits « en historien, en philosophe, en thĂ©ologien ». Cette façon de traiter le sujet impliquait en effet une difficile cohabitation entre le religieux, pour qui la volontĂ© de Dieu est inaccessible Ă lâhomme, et le philosophe, qui exige des rĂ©ponses [35]. Pour cette raison, le bĂ©nĂ©dictin donna « lâimpression tantĂŽt de croire, tantĂŽt de ne pas croire, aux vampires » [36] et, comme le souligne D. Soloviova-Horville, lorsque, « Ă la fin de la dissertation, Dom Calmet veut mettre fin Ă ce double discours, et condamne fermement les croyances aux vampires en disant quâelles sont vaines et ridicules, on a du mal Ă le croire. » La rĂ©putation de grand Ă©rudit du religieux, le respect dont il avait joui jusquâalors, ne comptĂšrent pour rien : un dictionnaire parla par exemple dâune « compilation de rĂȘveries, faites par un vieillard octogĂ©naire » et (trĂšs longtemps aprĂšs), en 1772, Voltaire moqua cruellement le bĂ©nĂ©dictin dans un passage du long et cĂ©lĂšbre article quâil consacra aux vampires, dans Questions sur l’EncyclopĂ©die [37]. Le philosophe profita de l’occasion pour s’en prendre aussi Ă Boyer d’Argens, Ă l’Ă©gard duquel il se montra trĂšs injuste. Il Ă©tait inconcevable en France que l’on pĂ»t sâintĂ©resser sĂ©rieusement Ă de telles histoires.
Par la suite, aucune autre Ă©tude française ne paraĂźtra au XVIIIe siĂšcle : il existe seulement quelques commentaires plus ou moins argumentĂ©s, surtout ceux de Louis Antoine Caraccioli, qui revint Ă plusieurs reprises sur le sujet. Enfin, ainsi que le nota Antoine Faivre Ă Cerisy, l’analyse du religieux fut longtemps la plus frĂ©quemment citĂ©e, tous pays confondus, avec celle de Boyer dâArgens.
Au sujet de la rĂ©ception du vampire en France, ajoutons quâen dehors de Calmet, de quelques journalistes â surtout La Varenne, qui, au dĂ©but, se passionna pour la question â, et de certains lecteurs de gazettes, tous les commentateurs français que nous connaissons rejetĂšrent sans Ă©quivoque lâexistence des vampires. De plus, lâinformation circula mal, les uns ignorant gĂ©nĂ©ralement les Ă©crits des autres ; par exemple, la lecture des textes de Boyer dâArgens, de Le Gendre, et du rĂ©dacteur de la BibliothĂšque Germanique nous laisse penser que ces auteurs nâont dĂ©couvert le vampirisme quâen 1736. De mĂȘme, cette phrase dans le numĂ©ro d’avril 1755 du Mercure historique, citĂ© plus haut : « Des lettres venues de la Haute SilĂ©sie nous ont annoncĂ© la reproduction de la Superstitieuse folie des Vampires, ou Sang-sues, qui, selon les avis, faisaient tant de ravages, il y a environ 30 ans, mais dont on nâa point entendu parler depuis… » conduit au mĂȘme type de conclusion. Signalons aussi qu’en dehors de Calmet, personne n’Ă©voque le troisiĂšme article du Glaneur ou ceux du Mercure Galant (que La Varenne lui-mĂȘme ne connaĂźt pas). Surtout, il est frappant de constater qu’au XVIIIe siĂšcle, les dĂ©bats allemands nâeurent pour ainsi dire aucun Ă©cho dans notre pays. Ă notre connaissance, seuls le rĂ©dacteur du Glaneur, Calmet et Voltaire en parlent â le premier, de façon assez prĂ©cise, dans son dernier article, le deuxiĂšme, lorsquâil cite cet article, et Voltaire, furtivement, quand il note en 1772 quâ « on nâentendit plus parler que de Vampires depuis 1730 jusquâen 1735 » (il nous semble en effet, que cette remarque concerne uniquement lâAllemagne). Dans un mĂȘme ordre d’idĂ©e, le Visum et Repertum est le seul texte Ă©tranger traduit en français avant le XXe siĂšcle.
Plus tard, le « vampire historique » allait sombrer dans un oubli durable en Europe occidentale : les premiĂšres Ă©tudes gĂ©nĂ©rales ne furent publiĂ©es quâau XXe siĂšcle (1914 en Angleterre, 1962 en France). Les premiers travaux bibliographiques vraiment aboutis, nĂ©cessaires Ă une apprĂ©hension satisfaisante du phĂ©nomĂšne, datent quant Ă eux des annĂ©es 1990 [38]. Sans doute le contraste entre la pensĂ©e des LumiĂšres et ces croyances Ă©tait-il de nature, au moins dans le cas de la France, Ă ce que le sujet fĂ»t durablement considĂ©rĂ© clos, dĂ©pourvu dâintĂ©rĂȘt.
La survie du vampire par la littĂ©rature ; les premiĂšres Ćuvres, le texte fondateur
Câest par la littĂ©rature que la survie du mythe fut assurĂ©e. La premiĂšre Ćuvre connue se consacrant au thĂšme, Der Vampir, dâAugust Ossenfelder, date de 1748 ; il sâagit dâun poĂšme de circonstance ayant pour fonction dâillustrer la traduction, dans une revue scientifique allemande, de lâanalyse de Boyer dâArgens.
Les dĂ©buts du vampire en littĂ©rature â un vampire nâayant plus quâun rapport lointain avec le monde paysan slave et ses croyances paĂŻennes â se situent plutĂŽt Ă lâaube du Romantisme. Ils furent prĂ©cĂ©dĂ©s et favorisĂ©s par lâĂ©mergence dâune nouvelle esthĂ©tique de la mort et des sentiments, dont tĂ©moignent entre autres la « poĂ©sie de cimetiĂšre », initiĂ©e dĂšs le milieu du XVIIIe siĂšcle par Gray et Blair, et, quelques dizaines dâannĂ©es aprĂšs, lâĂ©rotisme macabre des romans gothiques et des rĂ©cits du marquis de Sade. [39]
Les deux premiĂšres Ćuvres habituellement citĂ©es furent allemandes : Lenore de BĂŒrger (1773), une ballade qui allait dĂ©velopper chez les romantiques lâattrait pour le fantastique morbide, et, en 1797, La FiancĂ©e de Corinthe, que son auteur, Goethe, qualifia lui-mĂȘme de « poĂšme vampirique ». Ensuite, dâautres poĂšmes, anglais cette fois, plus ou moins liĂ©s au thĂšme, parurent : Christabel, de Coleridge (sans doute commencĂ© en 1797, publiĂ© en 1816), Thalaba the Destroyer (1801), de Robert Southey, qui sâinspire de Lenore, oĂč apparaĂźt peut-ĂȘtre pour la premiĂšre fois un vampire dans la littĂ©rature anglaise, The Vampyre, dâun certain John Stagg (1810), qui constitue a priori la premiĂšre Ćuvre britannique consacrĂ©e au thĂšme, Le Giaour, de Byron (1813), La Belle Dame sans Merci et Lamia, de Keats (1819 et 1820).
Toutefois, en dehors de Stagg, les poĂštes romantiques anglais nâont utilisĂ© le thĂšme vampirique que dâune façon allusive et fragmentaire ; de maniĂšre gĂ©nĂ©rale, on ne peut pas considĂ©rer le vampire comme un thĂšme majeur dâinspiration pour la poĂ©sie romantique, et mĂȘme pour la poĂ©sie en gĂ©nĂ©ral, lâeffet fantastique en tant que tel nâĂ©tant pas recherchĂ© dans la grande majoritĂ© des cas, le surnaturel nâĂ©tant lĂ que pour crĂ©er une atmosphĂšre, mais ne constituant pas lâessentiel du message poĂ©tique. « Chez Keats, comme chez Southey et Byron, le fantastique nâest utilisĂ© quâĂ des fins allĂ©goriques. Dans une telle perspective, le vampire devient alors un symbole qui permet dâexprimer toutes sortes dâidĂ©es poĂ©tiques, comme celles de la beautĂ© fatale ou du caractĂšre inĂ©luctable de la mort. » [40]
Câest la prose et non pas la poĂ©sie qui investira et perpĂ©tuera le thĂšme. Le premier rĂ©cit Ă lâintroduire fut peut-ĂȘtre Les Morlaques, un roman peu connu aujourdâhui, Ă©crit en français, publiĂ© de façon trĂšs confidentielle en Italie. Lâauteure, Justine Wynne, Ă©tait une connaissance de Casanova ; câest Miss X. C. V. dans ses MĂ©moires.
Dans Le Manuscrit trouvĂ© Ă Saragosse, commencĂ© dans les annĂ©es 1790, lâĂ©crivain polonais Jan Potocki utilisa Ă plusieurs reprises le mot pour dĂ©signer des personnages n’ayant en fait aucun rapport avec le mort-vivant slave et il fit explicitement rĂ©fĂ©rence Ă celui-ci dans un court passage. MalgrĂ© ces diverses allusions, on ne peut pas considĂ©rer que son roman aborde le thĂšme.
Nous ne connaissons pas dâautre apparition du vampire dans la prose en langue française, au XVIIIe siĂšcle. Selon les spĂ©cialistes, le roman gothique, bien que riche de centaines de titres, ne lâexploita jamais.
En 1801, un roman en trois volumes intitulĂ© Der Vampyr [41] parut en Allemagne, oĂč, si lâon en croit lâauteur de la Zauber-Bibliothek (1821), les vampires Ă©taient dĂ©jĂ presque oubliĂ©s. Aucun exemplaire nâest rĂ©fĂ©rencĂ© mais, au vu dâautres livres de lâauteur, Theodor Ferdinand Kajetan Arnold, on peut lĂ©gitimement penser quâil sâagit bien dâune histoire se consacrant au thĂšme. Elle pourrait donc ĂȘtre la toute premiĂšre [42]. Un deuxiĂšme roman allemand, dont le titre se traduit par « Le Vampire, ou les noces sanglantes de la belle Cratine, histoire bohĂ©mienne » [43], fut publiĂ© anonymement en 1812. Nous nâavons pas dâinformation sur ce rĂ©cit (dont il nâexiste sans doute pas de traduction).
LâĆuvre qui constitue le vĂ©ritable point de dĂ©part est anglaise : The Vampyre, de J. W. Polidori, le mĂ©decin et secrĂ©taire de Lord Byron. Elle fut Ă©crite Ă la suite du cĂ©lĂšbre sĂ©jour de lâĂ©tĂ© 1816, Ă la Villa Diodati, prĂšs de GenĂšve, que relate Mary Shelley dans la prĂ©face de Frankenstein, au cours duquel, aprĂšs quâeut Ă©tĂ© lancĂ©e lâidĂ©e que chacune des personnes prĂ©sentes pourrait Ă©crire un rĂ©cit terrifiant, la jeune femme conçut le projet de son grand roman. Lâauteur du Giaour commença une histoire de vampire quâil nâacheva pas, mais dont il parla Ă Polidori, qui rĂ©digea alors The Vampyre. Le conte fut publiĂ© en avril 1819 dans la presse.
Lâanecdote est trĂšs connue : lâĂ©diteur, cherchant a priori Ă augmenter ses ventes, attribua le rĂ©cit au cĂ©lĂšbre poĂšte ; Polidori protesta dĂšs le lendemain, prĂ©cisant quâil avait entiĂšrement Ă©crit le rĂ©cit et que lâidĂ©e originale venait de Byron. Ce dernier tint de son cĂŽtĂ© Ă dĂ©cliner toute responsabilitĂ© quant Ă la paternitĂ© de cette Ćuvre. MalgrĂ© cela, la premiĂšre Ă©dition en librairie fut elle aussi publiĂ©e sous son nom, et les notes quâil avait prises durant le sĂ©jour en Suisse, dans lesquelles on retrouve des Ă©lĂ©ments de la nouvelle de Polidori, parurent contre sa volontĂ©, quelques mois plus tard, chez son Ă©diteur attitrĂ©âŠ
La nouvelle fut traduite vers le dĂ©but du mois de juin en français, de nouveau sous la signature de Byron puis, trĂšs rapidement aussi, en allemand. Une autre traduction française parut en septembre, dans les Ćuvres de Byron. Le succĂšs fut particuliĂšrement important. Dâautres pays y eurent presque immĂ©diatement accĂšs, dont les Ătats-Unis oĂč, de plus, un rĂ©cit intitulĂ© The Black Vampyre, a Legend of St Domingo fut publiĂ© dĂšs la fin du mois de juin. [44]
Il est intĂ©ressant de noter Ă ce sujet que de nombreux cas de « vampirisme » furent recensĂ©s aux Ătats-Unis, durant plus dâun siĂšcle, Ă partir des annĂ©es 1780. Les croyances en question se manifestĂšrent presque invariablement lors dâĂ©pidĂ©mies de tuberculose, qui provoquaient des dĂ©cĂšs par « consomption ». Les morts incriminĂ©s Ă©taient soupçonnĂ©s dâabsorber les forces vitales des vivants et les rĂ©actions des populations Ă©taient similaires Ă celles des EuropĂ©ens (exhumations, crĂ©mationsâŠ). Le terme « vampire » aurait toutefois Ă©tĂ© utilisĂ© plutĂŽt par les journalistes que par les populations. La Revue Britannique, notamment, rendit compte dâune de ces affaires dans son numĂ©ro de juin 1854 [45]. L’Ă©crivain amĂ©ricain H. P. Lovecraft sâinspira de ce phĂ©nomĂšne en 1924, pour la nouvelle intitulĂ©e The shunned house.
Le vampire littéraire en France au XIXe siÚcle
En France, la naissance du vampire littĂ©raire doit beaucoup au remarquable et trĂšs avisĂ© Charles Nodier. Celui-ci endossa habilement le rĂŽle de spĂ©cialiste de la question vampirique, notamment en faisant paraĂźtre rapidement un trĂšs long compte-rendu de la nouvelle anglaise et en prĂ©façant le tout premier rĂ©cit que celle-ci inspira, Lord Ruthwen, ou les vampires, de Cyprien BĂ©rard, commercialisĂ© en fĂ©vrier 1820. Il faut noter Ă ce sujet que lâimage peu sĂ©rieuse vĂ©hiculĂ©e par le thĂšme l’incita Ă veiller farouchement Ă sa rĂ©putation et, lorsque lâĂ©diteur de Lord Ruthwen lui attribua la paternitĂ© du livre pour des raisons commerciales, il sâensuivit un bref mais violent conflit entre les deux hommes.
Peu de temps aprĂšs, lâĂ©crivain fit reprĂ©senter un mĂ©lodrame : Le Vampire. Cette piĂšce, jouĂ©e dĂšs le 13 juin 1820, mais manifestement Ă©crite, au moins en partie, en juillet 1819 [46], prĂ©cĂ©da de quelques jours celles de ses concurrents directs et constitua la premiĂšre adaptation mondiale du rĂ©cit anglais. Elle obtint un immense et durable succĂšs populaire, mais, surtout, elle eut un rĂŽle majeur dans le dĂ©veloppement du thĂšme, inspirant, en France ou Ă lâĂ©tranger, des adaptations, des imitations, des parodies et des opĂ©ras.
Une version anglaise, The Vampire or the bride of the Isles, fut ainsi reprĂ©sentĂ©e dĂšs le mois dâaoĂ»t (et reprise la mĂȘme annĂ©e puis en 1830, aux Ătats-Unis, oĂč le public eut dâailleurs lâoccasion dâapplaudir quelques autres piĂšces au cours des dĂ©cennies suivantes). [47]
Câest cette adaptation du mĂ©lodrame français qui permit au public britannique de se familiariser avec le personnage crĂ©Ă© par Polidori, incitant dâautres auteurs de thĂ©Ăątre Ă sâen emparer.
Nodier publia lâannĂ©e suivante lâambitieuse Smarra ou les dĂ©mons de la nuit (1821), qui entretient quelques liens avec le thĂšme, mais ce rĂ©cit peu conforme aux attentes des publics cultivĂ© et populaire fut mal reçu [48]. Lâauteur de Trilby dĂ©laissa alors durablement les morts-vivants ; il est en effet trĂšs probablement Ă©tranger Ă la compilation Infernaliana qui lui est habituellement attribuĂ©e. [49]
Si le vampire trouva instantanĂ©ment sa place dans nos thĂ©Ăątres, il en alla autrement dans le domaine de la littĂ©rature puisquâil sâĂ©coula presque cinq ans avant que ne parĂ»t, aprĂšs Lord Ruthwen, un autre rĂ©cit qui lui fĂ»t dĂ©diĂ© : La Vampire ou la Vierge de Hongrie, du talentueux Ătienne-LĂ©on de Lamothe-Langon [50]. En 1823, cependant, LĂ©on Dusillet, un ami de Nodier, avait livrĂ© un roman intitulĂ© Yseult de DĂŽle, qui consacre quelques pages intĂ©ressantes et surprenantes au thĂšme.
Durant les sept annĂ©es qui suivirent, la publication la plus remarquable fut La Guzla de Prosper MĂ©rimĂ©e, une prĂ©tendue traduction de poĂ©sies « illyriques » dans laquelle le vampire tient une large place. Ăcrite en 1825 ou 1826 selon V. M. Yovanovitch [51], elle fut commercialisĂ©e en 1827. On ne dĂ©nombre en revanche aucun roman, aucune nouvelle sur le thĂšme, mais seulement quelques trĂšs rares textes sây rattachant de façon plus ou moins lointaine.
Il est trĂšs probable qu’Ă l’instar de Nodier, les Ă©crivains furent rĂ©ticents Ă traiter un sujet ridiculisĂ© par les parodies thĂ©Ăątrales, ouvertement mĂ©prisĂ© et moquĂ© par une partie de la presse.
Ă notre connaissance, trĂšs peu de textes parurent durant la pĂ©riode 1830-1833 que lâon associe pourtant Ă la naissance de la littĂ©rature fantastique française, aprĂšs la vague de traductions du conteur allemand E. T. A. Hoffmann et sa prĂ©sentation au public. Ă la fin de lâannĂ©e 1831, Jacques Boucher de Perthes, lâĂ©clectique pĂšre de lâHomme antĂ©diluvien, fit paraĂźtre Paola, un court et remarquable roman quâil avait Ă©crit en 1823. InspirĂ© dâun fait divers [52], ce rĂ©cit met en scĂšne une crĂ©ature dont la nature nâest pas prĂ©cisĂ©e clairement, mais qui est un vampire, Ă tout le moins un ĂȘtre apparentĂ©. En dĂ©cembre 1832, câest-Ă -dire huit ans aprĂšs la Vierge de Hongrie, parut Le docteur Guntz, de Charles Nodier. Cette courte nouvelle, touchante, consacrĂ©e sans aucune ambiguĂŻtĂ© au thĂšme, empreinte en outre dâune certaine forme dâoriginalitĂ© et de recul, fut lâultime contribution de lâauteur de La FĂ©e aux miettes, qui, douze ans auparavant, avait presque Ă lui seul lancĂ© la mode du vampire en France. Nodier cherchait-il Ă donner une nouvelle impulsion au genre ?
Câest seulement vers 1835, semble-t-il, que le vampire commença dâĂȘtre plus prĂ©sent dans la littĂ©rature imprimĂ©e en langue française. La Morte amoureuse de ThĂ©ophile Gautier, par exemple, date de 1836 et, Ă partir de 1837 (pas avant, apparemment), Lamothe-Langon, connu pour ĂȘtre trĂšs attentif Ă suivre le goĂ»t du public, se pencha de nouveau sur le sujet, publiant en peu de temps quatre nouvelles sây consacrant, et, plus tard, un second roman : Lâhomme de la nuit, ou les mystĂšres (1842). Ces publications firent de lui le plus grand contributeur pour la premiĂšre moitiĂ© du XIXe siĂšcle.
Pour les Ćuvres de la seconde moitiĂ© du siĂšcle, nous renvoyons Ă la liste que nous avons Ă©tablie, en prĂ©cisant quâil nous paraĂźt certain que les dĂ©couvertes Ă venir, liĂ©es par exemple aux futures mises Ă disposition sur Internet de documents anciens numĂ©risĂ©s, ne changeront rien au fait que les romans de cette pĂ©riode sont dus Ă des auteurs de littĂ©rature populaire â essentiellement Paul FĂ©val et Pierre-Alexis Ponson du Terrail.
Enfin, durant le XIXe siĂšcle (et une large partie du XXe), les textes Ă©trangers ne constituĂšrent manifestement pas une prioritĂ© pour les traducteurs ; plus prĂ©cisĂ©ment, les rĂ©cits vampiriques nous semblent avoir souvent Ă©tĂ© nĂ©gligĂ©s. Par exemple, il fallut attendre 1985 pour pouvoir lire la cĂ©lĂšbre histoire For the Blood is the Life de lâAmĂ©ricain F. M. Crawford (1905), alors que, dĂšs le XIXe siĂšcle, plusieurs Ćuvres de ce romancier, certaines aux rĂ©sonnances fantastiques, avaient fait lâobjet de traductions. De mĂȘme, la remarquable nouvelle de Raupach, LaĂt die Todten ruhen. Ein MĂ€hrchen (Laisse dormir les morts), parue en 1823 ne fut traduite que vers la fin du XXe siĂšcle alors qu’une version anglaise, qui aurait pu ĂȘtre utilisĂ©e, fut publiĂ©e elle aussi en 1823. Le cas de Carmilla de Le Fanu, dont il est question ci-dessous, est encore plus marquant. (voir notre bibliographie).
Comment le vampire devint anglo-saxon Ă partir de la fin du XIXe siĂšcle
Dans le cas bien sĂ»r trĂšs important de la Grande-Bretagne, Jean Marigny estime que les dĂ©buts de ce personnage littĂ©raire furent timides ; vers 1830, il avait encore assez peu pĂ©nĂ©trĂ© les milieux populaires. La situation commença dâĂ©voluer avec deux rĂ©cits qui devaient, bien plus que dâautres, laisser des traces profondes : Varney the Vampyre (1847), un roman volumineux, trĂšs apprĂ©ciĂ© du public en dĂ©pit de ses incohĂ©rences, et, en 1872, la trĂšs belle nouvelle intitulĂ©e Carmilla, de J. S. Le Fanu. [53]
Chacun des deux, par ses caractĂ©ristiques, et, pour ainsi dire, indĂ©pendamment de ses qualitĂ©s littĂ©raires, inspira de nombreux auteurs et contribua ainsi Ă assurer la postĂ©ritĂ© du thĂšme â Ă cet Ă©gard, les Ćuvres françaises, dont certaines sont pourtant absolument remarquables, ne creusĂšrent pas de tels sillons.
Vers la fin du siĂšcle, alors que la ghost story connaissait son apogĂ©e, de nombreuses histoires furent publiĂ©es, surtout dans des revues populaires largement diffusĂ©es â les mĂȘmes oĂč paraissaient par exemple les aventures de Sherlock Holmes [54]. Câest dans cette pĂ©riode au cours de laquelle le vampire pĂ©nĂ©tra vraiment le grand public anglais que sâinscrit Dracula (1897), roman sans lequel le thĂšme du vampire en littĂ©rature nâaurait probablement jamais atteint lâimportance quâon lui connaĂźt de nos jours. Bram Stoker commença dây travailler dĂšs 1890.
Ce mouvement se prolongea jusquâĂ la PremiĂšre Guerre mondiale, faisant de cette crĂ©ature un Ă©lĂ©ment insĂ©parable de la culture anglo-saxonne. Cela Ă©tant, J. Marigny insiste sur le fait quâavant cette orientation importante de la littĂ©rature vampirique, lâintĂ©rĂȘt pour le thĂšme nâĂ©tait lâapanage dâaucun pays europĂ©en, la France, en particulier, pouvant ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme une « terre dâĂ©lection ». [55]
La littĂ©rature vampirique aurait pu sâĂ©teindre dĂšs le dĂ©but des annĂ©es trente, alors que le goĂ»t des Britanniques pour la ghost story dĂ©clinait et que, dans ce domaine, lâĂšre des grands classiques Ă©tait rĂ©volue. Cependant, elle connut dĂšs cette Ă©poque un renouveau aux Ătats-Unis, grĂące aux pulps, ces publications populaires tirĂ©es sur un papier de mauvaise qualitĂ©, dont les forts tirages et le coĂ»t modique assuraient une large diffusion.
En effet, vers 1925, une littĂ©rature fantastique originale Ă©mergeait dans ces revues, parallĂšlement Ă la naissance dâun cinĂ©ma dâhorreur et, en particulier, des histoires de vampires y Ă©taient publiĂ©es. [56]
En 1927, la piĂšce de thĂ©Ăątre adaptĂ©e du roman de Bram Stoker triompha Ă Broadway, emmenĂ©e par Bela Lugosi, aprĂšs avoir connu le succĂšs en Angleterre trois annĂ©es durant. Le Dracula de Tod Browning, rĂ©alisateur en 1927 de Londres aprĂšs minuit oĂč Ă©voluent de faux vampires, sortit en 1931, la mĂȘme annĂ©e que Docteur Jekyll et M. Hyde, et Frankenstein, un an avant La Momie, LâĂźle du docteur Moreau, Freaks et White ZombieâŠ
DĂšs lors, les histoires de vampires se multipliĂšrent dans les pulps et le lecteur amĂ©ricain, peu habituĂ© jusque-lĂ Ă cette littĂ©rature â il semble en effet nâexister que trĂšs peu de rĂ©cits antĂ©rieurs aux annĂ©es vingt â, sâen imprĂ©gna profondĂ©ment [57], tout en dĂ©couvrant les Lovecraft, Robert E. Howard et autre Clark Ashton Smith. Sans doute ces fictions lâaidaient-elles Ă©galement Ă oublier la Grande DĂ©pressionâŠ
Si les auteurs britanniques sâĂ©taient frĂ©quemment inspirĂ©s au cours des dĂ©cennies prĂ©cĂ©dentes de Carmilla et Dracula, les AmĂ©ricains, quant Ă eux, subirent uniquement lâinfluence du roman de Stoker, qui leur avait Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ© par le cinĂ©ma, et mirent gĂ©nĂ©ralement « en scĂšne des comtes ou barons vampires habitant de sombres chĂąteaux en Europe centrale » [58].
Ces nombreuses histoires dont la plupart sont Ă juste titre oubliĂ©es aujourdâhui, permirent aux Ătats-Unis de combler dĂ©finitivement leur retard sur les Ăźles britanniques, et de faire du vampire un Ă©lĂ©ment familier de lâimaginaire collectif anglo-saxon. Mieux, cela assura Ă ce personnage le statut de mythe moderne. [59]
Comme lâillustrent ces productions littĂ©raires, il Ă©tait difficile aprĂšs une Ćuvre aussi aboutie que Dracula, oĂč le thĂšme du vampire est codifiĂ© en dĂ©tail, dâĂ©crire des rĂ©cits Ă la fois originaux, attrayants et conformes Ă la tradition. Selon les mots de Jacques FinnĂ©, rapportĂ©s par J. Marigny, « âDracula est une fin de parcours. AprĂšs lui, la thĂ©matique en Ă©tait rĂ©duite au rabĂąchage [âŠ] Le pĂšre du vampire moderne faillit ĂȘtre, en mĂȘme temps, son assassin.â » [60]
Pour cette raison peut-ĂȘtre, certains auteurs abordĂšrent le thĂšme dâune façon trĂšs inhabituelle, en mettant par exemple en scĂšne des plantes vampires, des crĂ©atures extra-terrestres avides de sang ou des vampires psychiques, qui absorbent dâune façon ou dâune autre lâĂ©nergie vitale de leurs victimes.
Il fallut attendre 1954 pour voir un Ă©crivain se libĂ©rer du poids de Dracula et publier un roman remplissant les trois conditions Ă©noncĂ©es ci-dessus ; ce fut Richard Matheson, avec I am Legend, une Ćuvre de science-fiction.
Longtemps aprĂšs, en 1976, Interview with the Vampire, dâAnne Rice, allait Ă son tour rĂ©unir ces qualitĂ©s et, surtout, marquer par la mĂȘme occasion le vĂ©ritable tournant dans lâĂ©volution du vampire en littĂ©rature.
« On peut dire, toute proportion gardĂ©e, quâAnne Rice a jouĂ© pour le vampire contemporain le mĂȘme rĂŽle que Stoker Ă la fin du XIXe siĂšcle. Elle a, Ă son tour, inventĂ© une nouvelle façon de concevoir le personnage. Celui-ci nâa plus rien de dĂ©moniaque ; il est capable dâaimer et de souffrir comme le commun des mortels et le lecteur peut sâidentifier Ă lui. [âŠ] »
Ce roman suscita un « trĂšs grand enthousiasme auprĂšs dâun public international dont une partie ne sâintĂ©ressait pas particuliĂšrement aux vampires. En ouvrant de nouvelles perspectives sur ces personnages et en rĂ©ussissant Ă atteindre un vaste lectorat, plus exigeant que le prĂ©cĂ©dent, Anne Rice a inaugurĂ© un vĂ©ritable Ăąge dâor du vampire. [âŠ] des fan-clubs et des associations diverses sont crĂ©Ă©s dans le monde entier [âŠ] En moins de dix ans paraissent des romans et des nouvelles dâune qualitĂ© exceptionnelle comme [âŠ] Tous ces rĂ©cits donnent lâimpression que la littĂ©rature vampirique a enfin atteint lâĂąge adulte et que Lestat et ses semblables ne sont plus rĂ©duits au rĂŽle de simple Ă©pouvantail. » [61]
Un mot sur les ouvrages présentés ; le thÚme du vampire dans la bibliophilie
Sâagissant cette fois des lots composant cette collection, un peu plus de quarante, en majoritĂ© du XVIIe ou du XVIIIe siĂšcle, ont trait Ă lâhistoire du vampire. Plus dâune centaine concernent la littĂ©rature ; la plupart sont antĂ©rieurs Ă 1900.
Une part non nĂ©gligeable est laissĂ©e aux pĂ©riodiques. Les uns tĂ©moignent « en direct » des troubles de 1732 ; dâautres rendent compte dâĂ©vĂ©nements plus tardifs : ils illustrent la façon dont les croyances Ă©taient perçues par les EuropĂ©ens occidentaux, ainsi que leur persistance. Plusieurs se rapportent Ă la littĂ©rature : fictions parues dans la presse (et, souvent, non reprises en librairie), articles illustrant la naissance de la mode vampiriqueâŠ
Enfin, quelques lots de types diffĂ©rents, notamment des imprimĂ©s relatifs au cinĂ©ma, des gravures et dessins anciens, des lettres, complĂštent lâensemble.
Pour la partie historique, nous ne nous sommes jamais éloigné du sujet : nous ne présentons par exemple aucun ouvrage sur Gilles de Rais ou sur le vaudou.
Concernant la littĂ©rature, les frontiĂšres du thĂšme sont plus extensibles (trĂšs discutables parfois) et nous avons par ailleurs Ă©tĂ© un peu moins restrictif. Par exemple, une place est faite Ă des rĂ©cits qui renouvellent le thĂšme (« vampires psychiques » et autres crĂ©atures se nourrissant de lâĂ©nergie vitale de leurs victimes) et Ă quelques histoires mettant en jeu des revenants en chair ne pouvant raisonnablement pas ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme des vampires. NĂ©anmoins, les Ćuvres de ce type sont, par choix, fortement minoritaires au profit de celles qui vĂ©hiculent une image plus traditionnelle du mythe.
De façon gĂ©nĂ©rale, nous nâavons pas recherchĂ© systĂ©matiquement lâexhaustivitĂ©. Par exemple, lâĂ©dition originale du traitĂ© de Calmet ne figure pas, bien qu’il soit trĂšs aisĂ© de l’obtenir â on trouvera deux rĂ©Ă©ditions. Il en est de mĂȘme pour d’assez nombreux textes littĂ©raires, courants eux aussi, comme par exemple Les AprĂšs DĂźners de S.A.S. CambacĂ©rĂšs (1837), Les Tribunaux secrets (1851) ou encore Folk-Lore Chinois Moderne (1909) et Graour le monstre (1903) (voir notre bibliographie). En revanche, nous prĂ©sentons un nombre relativement important de lots extrĂȘmement rares.
Par ailleurs, il est important de souligner quâil nâexistait jusquâĂ prĂ©sent, Ă notre connaissance, quasiment aucun catalogue de libraire ou de vente publique dĂ©diĂ© au vampire historique ou littĂ©raire, ou lui accordant ne serait-ce quâune section. Plus prĂ©cisĂ©ment, la seule incursion dans le domaine, tous pays et Ă©poques confondus, pourrait ĂȘtre celle opĂ©rĂ©e en 1975 par Rainer G. Feucht (librairie BMCF), qui fit alors Ćuvre de pionnier. Selon lui, aucun catalogue de ce genre nâexistait auparavant en Allemagne, « (si ce nâest dans le monde) ». Le sien comporte 202 numĂ©ros incluant quatorze livres antĂ©rieurs au XIXe siĂšcle, dont neuf trĂšs rares (R. G. Feucht en a produit un autre en 1981, mais dans la mesure oĂč il est consacrĂ© Ă des aspects du thĂšme qui ne nous concernent pas ici et quâil comporte de trĂšs nombreux livres modernes, nous ne lâavons pas pris en compte).
Dans le cas du vampirisme historique, cette carence, surprenante au premier abord, pourrait sâexpliquer en partie par lâabsence dâĂ©tudes d’ensemble (cf supra). En effet, le mort-vivant slave perd beaucoup de son intĂ©rĂȘt dĂšs lors que l’on ignore les diverses conditions et causes profondes qui ont prĂ©sidĂ© Ă sa naissance. RĂ©duit Ă n’ĂȘtre que le lointain et impalpable produit de superstitions jugĂ©es grossiĂšres, voire mĂ©prisables, on peut concevoir qu’il n’ait pas suscitĂ© d’engouement particulier ni mĂȘme de curiositĂ© parmi les collectionneurs. Une autre raison, peut-ĂȘtre plus importante encore, est le faible nombre de titres Ă collectionner et leur raretĂ© sur le marchĂ©, qui rendent extrĂȘmement difficile et mĂȘme inĂ©vitablement insatisfaisante, en l’absence d’une bibliographie aboutie, la constitution dâune collection tant soit peu ambitieuse. [62] Sans doute cette raretĂ© n’est-elle d’ailleurs pas sans liens avec l’indiffĂ©rence consĂ©cutive Ă l’absence d’Ă©tudes, les livres les moins estimĂ©s n’Ă©tant pas ceux que lâon conservait en prioritĂ© dâune gĂ©nĂ©ration Ă lâautre. [63] En tout Ă©tat de cause, rĂ©unir ne serait-ce qu’une poignĂ©e de monographies allemandes du dix-huitiĂšme siĂšcle autres que les deux ou trois titres que l’on voit passer de temps en temps en vente (« rĂ©guliĂšrement » mais rarement) nĂ©cessite, nous semble-t-il, de nombreuses annĂ©es de recherches opiniĂątres.
Enfin, prĂ©cisons que, quitte Ă nous montrer rĂ©pĂ©titif, nous avons repris dans nos fiches certains Ă©lĂ©ments de lâintroduction ou de notre bibliographie, afin que chacune des trois rubriques â qui constitue un complĂ©ment aux deux autres â puisse ĂȘtre lue indĂ©pendamment, ou presque. D’autre part, plutĂŽt qu’user de paraphrases ou de rĂ©sumĂ©s dans nos commentaires, nous avons frĂ©quemment choisi de citer des extraits des ouvrages que nous avons utilisĂ©s. L’intention Ă©tait d’ĂȘtre aussi fidĂšle que possible Ă la pensĂ©e des auteurs. Nous sommes particuliĂšrement reconnaissant Ă Antoine Faivre, Jean Marigny et Daniela Soloviova-Horville de nous avoir autorisĂ© Ă puiser dans leurs travaux, ce que nous avons fait abondamment.
Les lots sont prĂ©sentĂ©s par ordre chronologique. Nous avons gĂ©nĂ©ralement reproduit sans les modifier les textes citĂ©s, en conservant aussi les fautes. Pour simplifier, nous avons cependant fait quelques exceptions. Par exemple, « ils devroient eftre » (« ils devraient ĂȘtre »), devient « ils devroient estre ». Les dimensions donnĂ©es dans les descriptions physiques des livres sont celles des feuillets.
[1] Les citations de cette auteure sont signalĂ©es par les initiales D. S-H. Sa thĂšse est en accĂšs libre sur le site calameo.com : deux fichiers donnant lâintĂ©gralitĂ© de la version originale, plus longue que celle sur papier. Lorsque nous nous y rĂ©fĂ©rons, nous prenons en compte les deux versions, en indiquant dâabord les pages correspondant Ă la publication en librairie. Dans le cas prĂ©sent : p. 18-19 (ou 26-27).
[2] D. S-H, p. 39 (ou 61-62).
[3] Ibid., p. 19-20 (ou 28).
[4] Ibid., p. 20-21 et 91-95 (ou 29-30 et 145-151).
[5] Ibid., p. 20-21 (ou 29-30).
[6] Ibid., p. 21 (ou 30). Daniela Soloviova-Horville a eu la gentillesse de nous prĂ©ciser que, de son point de vue, « les civilisations qui pratiquent lâinhumation [sans prendre en compte une dimension religieuse quelconque] sont celles qui sont le plus favorables Ă lâapparition de telles craintes du cadavre âvivantâ ». PrĂ©cisons dâautre part que cette auteure aborde Ă©galement dans son ouvrage trĂšs dĂ©taillĂ© les consĂ©quences de lâapparition de lâhĂ©rĂ©sie bogomile dans les Balkans, Ă partir du Xe siĂšcle ; dans cette doctrine, la mort Ă©tait considĂ©rĂ©e comme un Ă©vĂ©nement abject et abhorrĂ©, le cadavre comme une matiĂšre morte, en proie aux forces obscures (p. 30-32 et 42 [ou 45-49 et 66]).
[7] Pour la question des traces Ă©crites : Ibid., p. 17-18 (ou 24-26).
[8] D. S-H, p. 42 (ou 66).
[9] Sur la question de la crainte des morts : Robert Baudry : Ăpiphanie des vampires, Cerisy, p. 92-93 (voir les ouvrages rĂ©fĂ©rencĂ©s Ă la suite de cette introduction). Lâauteur prĂ©cise que « les Indo-EuropĂ©ens semblent avoir Ă©tĂ© les grands propagateurs de cette croyance, diverses formes de vampires se rencontrant, sous divers noms, sur toute lâaire couverte par leurs migrations ».
[10] A. Faivre in Adrien Party : Vampirologie, Ăditions Actusf, 2022.
[11] Mercure Galant, p. 115-116 (mars) et 62-69 (mai)
[12] D. S-H, p. 142-143 (ou 219-221)
[13] Mercure Galant, février 1694, p. 13-119
[14] A. Faivre, Cerisy, p. 47. Cet auteur discute ensuite assez longuement de cette interprĂ©tation du vampirisme (p. 55-59). Nous rendons compte de son analyse dans la fiche consacrĂ©e Ă notre exemplaire de l’Ă©dition de 1728 de l’ouvrage de Ranft.
[15] Notons que dĂšs le 10 fĂ©vrier 1693, indĂ©pendamment des articles du Mercure Galant, un docteur de Sorbonne, sollicitĂ© par un correspondant polonais, avait rendu un avis sur les Ă©vĂ©nements. Il avait en particulier condamnĂ© les dĂ©capitations des cadavres incriminĂ©s, « apparus en songe » Ă leurs victimes. Voir Ă ce sujet le second tome du Dictionaire [sic] des cas de conscience de Lamet et Fromageau (1733, p. 13-20) ; cette publication nâest pas mentionnĂ©e dans la documentation dont nous disposons. Voir Ă©galement lâĂ©dition de 1749 du traitĂ© de Calmet sur les vampires (infra), tome 2, p. 218 et 227-232. Fait intĂ©ressant, le numĂ©ro d’avril 1733 du Mercure de France fait le rapprochement entre son article de mai 1732 et les Ă©vĂ©nements relatĂ©s dans le dictionnaire (sans citer pour autant les articles du Mercure Galant…).
[16] Voir l’article de Koen Vermeir listĂ© ci-dessous (p.5).
[17] D. S-H, p. 145-146 et 9 (ou 223-225 et 11-12).
[18] Ibid., p. 148 (ou 226-228). La traduction est dâAntoine Faivre.
[19] Ou presque : voir les trois entrĂ©es consacrĂ©es Ă un certain Johannes Kanold dans la bibliographie dâAntoine Faivre.
[20] Ceux-ci ne semblent pas avoir laissĂ© de traces Ă©crites Ă lâĂ©poque : ils ne furent mentionnĂ©s quâĂ partir de 1732, notamment par Calmet dans son traitĂ©. Voir A. Faivre, Cerisy, p. 49.
[21] A. Faivre, Cerisy, p. 49.
[22] Traduit par A. Faivre, Les Vampires, p. 55-56.
[23] A. Faivre, Les Vampires, p. 253 et Cerisy, p. 50-52.
[24] D. S-H, p. 152-153 (ou 236-238).
[25] Ranft explique ses motivations dans la prĂ©face. La remarque d’A. Faivre figure dans sa bibliographie.
[26] On trouvera les rĂ©flexions de BenoĂźt XIV aux pages 323-324 de De servorum dei beatificatione et beatorum canonizatione (1749), qui constitue le quatriĂšme tome de BENEDICTI XIV : Opera in duodecim tomos distributa. Ce texte est traduit dans la version française de l’anthologie d’Ornella Volta : Roger Vadim prĂ©sente: Histoires de vampires (1961). Voir Ă©galement Antoine Faivre, Cerisy, p. 54. Au sujet de la rĂ©action de l’impĂ©ratrice : A. F., Cerisy, p. 59-60. Les Ă©vĂ©nements de Haute SilĂ©sie furent relatĂ©s dans la presse française, en particulier dans les numĂ©ros dâavril et mai du Mercure historique et politique. Ces deux articles, les plus complets de ceux que nous avons consultĂ©s, font Ă©tat d’un rescrit de Marie-ThĂ©rĂšse mais nous ne sommes pas certain qu’il s’agisse du texte juridique que cite A. Faivre, pour lequel, surtout, nous manquons d’informations. Ils ne sont pas mentionnĂ©s dans notre documentation.
[27] D. S-H, p. 156 (ou 242-243).
[28] Toutefois, le numĂ©ro dâaoĂ»t 1732 du Journal des Sçavans aborde indirectement la question dans le compte-rendu dâun livre ayant pour sujet la ville de Varsovie, publiĂ© deux ans plus tĂŽt par le premier MĂ©decin du Roi de Pologne. Il est question dans un passage dâexhumations et de dĂ©capitations dâUpierz, soupçonnĂ©s de sortir « du sĂ©pulcre pour rĂ©pandre la peste dans le Pays, pour effrayer les vivans et leur faire des blessures ». On apprend que selon lâauteur, C-H Erndtel, « de pareilles exĂ©cutions contre des morts se font tous les jours en Pologne par lâautoritĂ© de Juges aussi crĂ©dules et aussi superstitieux quâignorans». Le journaliste ne connaĂźt manifestement pas lâexistence des articles du Glaneur et du Mercure de France. Le mot « vampire » est absent de ce compte-rendu et Upierz est traduit par « sorcier ». Il est prĂ©cisĂ© que ce dernier terme sâapplique Ă des personnes soupçonnĂ©es de sortilĂšges pendant leur vie et quâil suffit, pour ĂȘtre considĂ©rĂ© ainsi, « quâil paroisse sur le corps mort quelque marque extraordinaire, quoique naturelle », telle que lâabsence de barbe pour un homme⊠(p. 447-448) Cet article qui tĂ©moigne Ă la fois des croyances en Pologne en 1730 et de la rĂ©ception du vampirisme en France nâest pas mentionnĂ© dans notre documentation. Notons Ă ce sujet que la brĂšve communication Ă©voquĂ©e plus haut, parue dans Relations VĂ©ritables et antĂ©rieure Ă la premiĂšre publication du Glaneur, semble nâĂȘtre connue que depuis peu de temps. Le mot « vampire » y est « presque » citĂ© (nous ne pouvons pas rentrer ici dans les dĂ©tails). Voir Johan Pierret : Une brĂšche dâirrationalitĂ© au siĂšcle des LumiĂšres ? TraitĂ©s et rĂ©cits francophones de vampires entre France et Empire autrichien. FacultĂ© de philosophie, arts et lettres, UniversitĂ© catholique de Louvain, 2018. Prom. : Mostaccio, Silvia ; Zanone, Damien. http://hdl.handle.net/2078.1/thesis:16870 » ; p. 60-61. J. Pierret, qui semble seul Ă discuter de cet article, lâa dĂ©couvert grĂące Ă un dĂ©pouillement physique et non pas numĂ©rique dâimprimĂ©s.
[29] On lit habituellement que cette lettre parut en 1737 ; le recueil dans lequel elle figure porte en effet cette date. Cependant ce recueil est formĂ© par la rĂ©union de livraisons (les lettres) qui parurent d’abord sĂ©parĂ©ment : l’Ă©diteur fournissait avec la derniĂšre une page de titre, une prĂ©face etc. Celle sur les vampires est Ă la date 1736, comme les 121e, 129e, 130e et 131e.
[30] Tome 3, p. 911. Notre documentation ne fait pas mention de cet article : selon celle-ci, la premiĂšre apparition du vampire slave dans un dictionnaire français eut lieu en 1752, la dĂ©finition n’occupant qu’une seule ligne et ne faisant que renvoyer Ă lâarticle « Stryges ».
[31] D. S-H, p. 317 (ou 496-497). Dans The Vampire : Origins of a European Myth, Thomas M. Bohn commente un article d’avril 1732 du Neu-eröffnetes Welt- und Staats-Theatrum dans lequel l’auteur fait un rapprochement entre le vampire nouvellement mis au jour, les morts mĂącheurs et l’upierz polonais. Bohn note que ce point de vue [quoique juste] est rarement partagĂ© : « Le manque dâintĂ©rĂȘt des mĂ©decins et des officiers habsbourgeois pour les modes de vie de la population de la rĂ©gion de la frontiĂšre militaire des Habsbourg, rĂ©sultant de leur incomprĂ©hension des traditions locales, sâest ensuite reflĂ©tĂ© dans lâinterprĂ©tation savante des cadavres non dĂ©composĂ©s. Les contributions sans prĂ©jugĂ©s, telles que la remise en question du caractĂšre unique des vampires par [cette revueâŠ], restĂšrent largement une exception. » (passage traduit de la page 91) Dans La Mythologie slave (1901), le spĂ©cialiste Louis LĂ©ger consacre un chapitre à « la vie d’outre-tombe » sans qu’aucune rĂ©fĂ©rence aux vampires, mĂȘme lointaine, n’apparaisse. Il s’interroge sur l’existence d’un culte des morts, prĂ©cise que l’on ne saurait se baser sur des Ă©tudes basĂ©es sur des textes dont il a Ă©tĂ© Ă©tabli par la suite que certains sont absolument apocryphes et conclut que « les traditions encore existantes en dĂ©pit du christianisme chez certains peuples slaves sont jusqu’Ă nouvel ordre la meilleure preuve Ă fournir pour dĂ©montrer que leurs ancĂȘtres paĂŻens avaient l’idĂ©e d’une vie d’outre-tombe. C’est le folk-lore qui doit ici supplĂ©er au silence des textes anciens. » Il Ă©crit d’ailleurs : « Au fond nous savons trĂšs peu de chose des idĂ©es des Slaves paĂŻens sur la vie d’outre-tombe. » (p. 203) Inversement, il avait rapportĂ© quelques gĂ©nĂ©ralitĂ©s sur le vampirisme dans ses Ătudes slaves (1875) sans proposer de lien avec les rites funĂ©raires. (p. 178-179)
[32] Ibid., p. 212-214 (ou 336-339).
[33] D. S-H fait remarquer que la mention « De Hongrie » est inexacte puisque lâannexion de la Serbie Ă lâEmpire des Habsbourg prit fin en 1739. Elle prĂ©cise que pour cette raison, ce pays fut longtemps considĂ©rĂ© Ă tort comme le berceau du vampirisme, de nombreux auteurs ayant propagĂ© lâerreur de Calmet. Elle ajoute que la figure du vampire est Ă©trangĂšre aux croyances populaires des Magyars (Ibid., p. 173-174 [ou 278-279]).
[34] Le succĂšs de librairie de l’ouvrage est attribuable aux nombreuses histoires de revenants recueillies par l’auteur et mises en valeur par son Ă©criture soignĂ©e, sachant mĂ©nager les effets. Plus tard, au XIXe siĂšcle, des « compilations » comme Infernaliana, et diverses fictions pures, notamment La Famille du Vourdalak, ou encore La Vampire ou la Vierge de Hongrie dont il est question plus loin, sâinspireront de certaines de ces histoires. Ainsi, ce traitĂ© sâinscrit pleinement dans la genĂšse de la littĂ©rature fantastique (voir par exemple : A. Faivre, Cerisy, p. 60 et notre introduction Ă la catĂ©gorie « LittĂ©rature fantastique et divers »).
[35] D. S-H, p. 176-179 (ou 282-286)
[36] A. Faivre, Cerisy, p. 60
[37] Cet article fut repris ultĂ©rieurement dans son Dictionnaire philosophique, dont la premiĂšre Ă©dition en 1764 ne comportait qu’une courte allusion Ă Calmet : « [âŠ] je lâaime bien autant que la dĂ©clinaison des arĂŽmes, les formes substantielles, la grĂące versatile et les vampires de Dom Calmet. » (fin du paragraphe intitulĂ© « Corps »). On trouve un autre commentaire dans une rĂ©Ă©dition augmentĂ©e, Ă l’article « RĂ©surrection. Section seconde » : « Le profond philosophe Dom Calmet trouve dans les Vampires une preuve bien plus concluante. Il a vu de ces Vampires qui sortaient des cimetiĂšres pour aller sucer le sang des gens endormis ; il est clair qu’ils ne pouvaient sucer le sang des vivants s’ils Ă©taient encore morts ; donc ils Ă©taient ressuscitĂ©s ; cela est pĂ©remptoire » (Ă©dition de 1767, tome second).
[38] Il sâagit de la bibliographie dâA. Faivre et de Mortuus non mordet: Dokumente zum Vampirismus 1689-1791, publiĂ© par Klaus Hamberger en 1992.
[39] D. S-H, p. 225-228 (ou 360-364).
[40] J. Marigny, Le Vampire dans la littérature anglo-saxonne, p. 95-99 et 388-390.
[41] Ou, peut-ĂȘtre, Der Vampir, selon les mentions de lâĂ©poque.
[42] Marco Frenschkowski : article Der Vampir, in Encyclopedia of the Vampire, Joshi, 2011, p. 339.
[43] Un volume in-8
[44] RĂ©Ă©dition la mĂȘme annĂ©e, puis en 1845.
[45] Tome XXI, p. 484 (Les vampires américains).
[46] Voir notre bibliographie.
[47] Voir Roxana Stuart : Stage Blood: Vampires of the 19th Century Stage ; 1994.
[48] P. G. Castex, p. 130-134 et 9 (références ci-dessous).
[49] DâaprĂšs Jacques-RĂ©mi Dahan, « Infortunes des initiales, ou Charles Nodier mystifiĂ© », dans DeÌrision et supercherie dans lâĆuvre de Charles Nodier (sous la dir. De J. Geoffroy), Dole, eÌd. de La Passerelle, 2009, p. 71-94.
[50] Trois volumes in-12 Ă la date 1825, commercialisĂ©s Ă la fin de lâannĂ©e prĂ©cĂ©dente
[51] « La Guzla » de Prosper MĂ©rimĂ©e ; Ătude dâhistoire romantique (1911), p. 223.
[52] Il sâagit dâune affaire de « vampirisme » : voir notre bibliographie.
[53] J. Marigny, Le Vampire dans la littérature anglo-saxonne, p. 109 et 140.
[54] Ibid., p. 141-144.
[55] Ibid., p. 4.
[56] Ibid., p. 146 et 155-156.
[57] Ibid., p. 17-18.
[58] J. Marigny, Le Vampire dans la littérature anglo-saxonne, p. 152 et 10 et Un vampire renaßt de ses cendres, p. 29-31.
[59] J. Marigny, Le Vampire dans la littérature du XXe siÚcle, p. 18.
[60] Ibid, Le Vampire dans la littĂ©rature du XXe siĂšcle, p. 71-72. La citation de Jacques FinnĂ© est extraite de La littĂ©rature fantastique : Essai sur lâorganisation surnaturelle, Bruxelles, Ă©ditions de lâUniversitĂ©, 1980, p. 164.
[61] J. Marigny, Le Vampire dans la littĂ©rature anglo-saxonne, p. 152-153 et Le Vampire dans la littĂ©rature du XXe siĂšcle, p. 19-21. Il est prĂ©cisĂ© p. 290 quâ « aujourdâhui » (en 2003, date de publication de cet essai), statistiquement, plus de quatre-vingt pour cent des histoires de vampires publiĂ©es dans le monde sont originaires des Ătats-Unis.
[62] Il existe Ă notre sens moins dâune soixantaine de publications « mĂ©ritant » dâĂȘtre collectionnĂ©es : une trentaine de monographies dont vingt-cinq environ sont allemandes, des articles de presse et des livres consacrant un passage ou un chapitre au sujet (la situation, soit dit en passant, est donc absolument diffĂ©rente de celle des sciences occultes ; par exemple, le catalogue de la bibliothĂšque de Stanislas de Guaita contenait plus de deux-mille-deux-cents entrĂ©es). Quant Ă la question de la raretĂ©, mĂȘme si, bien sĂ»r, le marchĂ© allemand du livre ancien nous est bien moins familier que le français et que nous n’ignorons pas que de façon gĂ©nĂ©rale, de nombreux livres se vendent sans apparaĂźtre sur Internet, nous ne croyons pas risquer de nous tromper outre mesure en affirmant, grĂące Ă la mise en place il y a de nombreuses annĂ©es d’alertes Ă©lectroniques sur diverses plateformes de ventes, complĂ©tĂ©e entre autres par des recherches poussĂ©es dans les sites mettant en ligne les archives de ventes publiques, qu’une majoritĂ© des traitĂ©s parus outre-Rhin sont extrĂȘmement difficiles Ă obtenir pour un collectionneur. Bien sĂ»r, la plus grande prudence s’impose dans ce domaine, mais ce sentiment est confortĂ© par la consultation des anciens catalogues de ventes auxquels nous avons eu accĂšs. Ainsi, les deux seuls ouvrages autres que la traduction du traitĂ© de Calmet proposĂ©s en 1903 par Rosenthal (Bibliotheca magica et pneumatica ; 8875 titres) sont l’Ă©dition de 1728 du traitĂ© de Ranft et la traduction allemande du rapport de van Swieten, or ceux-ci font justement partie des titres que nous avons eu le plus souvent lâoccasion de voir passer sur le marchĂ©, ces derniĂšres annĂ©es. En 1918, un lot important figurait Ă la vente Waller (Bibliotheca magica ; 620 titres), mais câĂ©tait le seul sur le thĂšme. Quant au catalogue Sciences SecrĂštes dâAlexis Ouvaroff (1870 ; 1883 entrĂ©es), il ne proposait que le traitĂ© de Calmet et lâouvrage de Collin de Plancy (Histoire des VampiresâŠ, 1820). Le cas spĂ©cifique des catalogues de grands collectionneurs français s’Ă©tant intĂ©ressĂ©s de trĂšs prĂšs Ă des domaines tels que la sorcellerie (Guaita, Bechtel, Max, Garçon, Lambert, Gruaz) et de ceux, assez nombreux, du XVIIIe ou du XIXe siĂšcle, accessibles par Gallica ou Google Books â celui de lâabbĂ© Sepher entre autres â qui abordent Ă©galement ce type de sujets au sein de sections dĂ©diĂ©es, souvent trĂšs bien fournies, mĂ©rite lui aussi dâĂȘtre Ă©voquĂ©. Dans le meilleur des cas, on n’y trouve en effet, en tout et pour tout, que le traitĂ© de Calmet et le livre de Collin de Plancy. Cela dit, nous ignorons quelle est la part de la raretĂ© et celle du manque d’appĂ©tence pour le thĂšme du vampire dans la pauvretĂ© du contenu de tous ces catalogues, français ou Ă©trangers, or cette question est importante. Citons enfin le cas de Bibliotheca esoterica, du libraire Dorbon (1940), qui proposait parmi ses 6707 numĂ©ros une des monographies de 1732 (n° 1451). Quoi qu’il en soit, Magia Posthuma, de Charles-Ferdinand Schertz, est incontestablement « introuvable » (le fait est d’ailleurs notoire) et, manifestement, la situation est Ă peu prĂšs Ă©quivalente pour le traitĂ© de 1679 sur la mastication des morts dans le tombeau et probablement plusieurs autres titres dont nous n’avons jamais vu d’exemplaires en vente ou ayant Ă©tĂ© vendus (mais que nous avons, il est vrai, cherchĂ©s de façon moins systĂ©matique). Notons pour terminer que la question de la raretĂ© ne concerne pas que les publications en librairie : beaucoup de textes historiques ou littĂ©raires sont parus uniquement dans la presse, or les forts tirages de celle-ci ne garantissent absolument pas, loin s’en faut, quâon trouve aisĂ©ment les numĂ©ros correspondants. Par exemple, dans un domaine diffĂ©rent, on ne connaĂźt dit-on quâun seul exemplaire du quotidien ProgrĂšs des Ardennes, dans lequel Rimbaud publia Le RĂȘve de Bismarck.
[63] Pour une raison comparable, certains titres de FĂ©val et (surtout) de Ponson du terrail sont presque introuvables : la littĂ©rature populaire n’Ă©tait pas destinĂ©e Ă ĂȘtre conservĂ©e « aprĂšs consommation ».
Principaux ouvrages et articles utilisés pour cette introduction et pour les fiches des livres proposés à la vente
Antoine Faivre :
– Les Vampires, essai historique, critique et littĂ©raire, Losfeld, Le Terrain vague, 251 p., 1962, sous lâidentitĂ© Tony Faivre. PremiĂšre Ă©tude dâensemble française. Le tapuscrit date de 1959. GrĂące Ă sa connaissance approfondie de lâallemand et de la culture germanique, lâauteur, qui, Ă de trĂšs rares exceptions prĂšs, a utilisĂ© des documents de premiĂšre main, Ă©tait en mesure dâapprĂ©hender au mieux les Ă©crits dâĂ©poque, notamment ceux qui concernent la rĂ©ception du vampire Ă partir de 1732 et les interprĂ©tations qui en ont Ă©tĂ© faites outre-Rhin.
– Du vampire villageois aux discours des clercs (GenĂšse dâun imaginaire Ă lâaube des LumiĂšres). Article paru dans Les Vampires. Colloque de Cerisy, Paris, Albin Michel (Cahiers de lâHermĂ©tisme), 1993, p. 45-74. Le colloque, co-dirigĂ© par A. Faivre et Jean Marigny, sâest tenu en aoĂ»t 1992.
– Bibliographie des vampires (1679-1807). Elle figure Ă la suite de lâarticle mentionnĂ© ci-dessus et contient plus de quatre-vingt-dix entrĂ©es.
Jean Marigny (J. M.) :
– Le Vampire dans la littĂ©rature anglo-saxonne, Didier-Ărudition, 1985, deux volumes, 880 p. en tout. ThĂšse dâĂtat, soutenue en 1983. Ouvrage unique en son genre, absolument indispensable.
– Un vampire renaĂźt de ses cendres, p. 7-79 in Dracula, Autrement (Figures mythiques), 1997, 165 p. Cet ouvrage contient Ă©galement des articles de Jacques FinnĂ©, Gilles Menegaldo et Jean-Claude Aguerre.
– Le Vampire dans la littĂ©rature du XXe siĂšcle, Champion, 2003, 383 p.
– Dracula, prince des tĂ©nĂšbres, Larousse (Dieux, Mythes & HĂ©ros), 2009, 223 p. En collaboration avec CĂ©line du ChĂ©nĂ©.
Daniela Soloviova-Horville (D. S-H) :
Les vampires, folklore slave Ă la littĂ©rature occidentale, LâHarmattan, 2011, 366 p. ThĂšse soutenue en 2006. Lâauteure reprend notamment, en les approfondissant trĂšs minutieusement, les questions historiques « classiques » Ă©voquĂ©es par ses prĂ©dĂ©cesseurs. Dâautre part, son apport Ă la connaissance des croyances slaves au vampire, dont les sources avaient Ă peine Ă©tĂ© Ă©tudiĂ©es auparavant, est essentiel. Celui-ci a Ă©tĂ© favorisĂ© par les origines bulgares de lâauteure et par ses connaissances linguistiques. Ainsi, ce livre constitue Ă notre sens la somme en langue française la plus complĂšte relativement Ă lâhistoire des vampires. Dans le cas de nos fiches, les pages indiquĂ©es correspondent Ă la version papier.
â Stefan Hock : Die Vampyrsagen und ihre Verwertung in der deutschen Litteratur (Berlin, A. Duncker, 1900, 133 p.).
â Dudley Wright : Vampires and Vampirism (London, W. Rider and son, limited, 1914, 177 p.).
â Montague Summers : The vampire in Europe (London, Kegan Paul, Trench, Trubner and Co, 1929, 330 p.), rĂ©imprimĂ© sous le titre The vampire in Lore and Legend. M. Summers a aussi publiĂ© The vampire, his kith and Kin (1928, 356 p.), devenu The vampire puis Vampires and Vampirism ; ce livre contient une bibliographie comportant de nombreux titres, mais quasiment aucun dĂ©tail sur le contenu ou lâintĂ©rĂȘt des textes relativement au sujet nâest donnĂ©. Ces deux ouvrages gĂ©nĂ©raux, intĂ©ressants quoique rĂ©putĂ©s non exempts de dĂ©fauts, sont parmi les premiers sur le sujet, en langue anglaise. Montague Summers a par ailleurs publiĂ© des travaux sur la lycanthropie, le roman gothique, la sorcellerie, et Sade â autant de thĂšmes reprĂ©sentĂ©s dans cette collection. Il est aussi le premier traducteur anglais du livre de Philip Rohr sur la mastication des morts dans le tombeau.
â Pierre-Georges Castex : Le Conte Fantastique en France (JosĂ© Corti, 1994, huitiĂšme rĂ©impression, 468 p.). Il sâagit de la thĂšse de lâauteur, soutenue et publiĂ©e en 1951. P. G. Castex (1915-1995) est le premier universitaire Ă sâĂȘtre intĂ©ressĂ© de façon approfondie au fantastique dans la littĂ©rature française, ouvrant ainsi la voie. Il a publiĂ© une anthologie du conte fantastique français en 1947, rĂ©Ă©ditĂ©e en 1963 avec des modifications portant sur le choix des textes.
â Jean Goens : Loups-garous, vampires et autres monstres (CNRS Ăditions, 1993, 144 p.). Cet ouvrage contient une bibliographie accompagnĂ©e de commentaires.
â Jean-Pierre Galvan : Paul FĂ©val, Parcours dâune Ćuvre (Ă©ditions Encrage, 2000, 167 p.).
â Alain Fuzellier : Ponson du Terrail, Dictionnaire des Ćuvres (Ă©ditions Encrage, 2008, 816 p.). Cette publication, la premiĂšre dâune telle envergure sur notre auteur, comble un vide de prĂšs de 150 ans. Elle offre une longue introduction suivie dâune Ă©tude titre par titre â rĂ©sumĂ©, analyse⊠â de lâĆuvre de Ponson, oĂč tous les Ă©lĂ©ments bibliographiques nĂ©cessaires au bibliophile sont donnĂ©s.
â Koen Vermeir : Vampirisme, corps mastiquants et force de lâimagination. Analyse des premiers traitĂ©s sur les vampires (1659-1755) in Camenae n° 8 â dĂ©cembre 2010. Cet article de 16 pages est accessible sur Internet par un copier-coller du titre (site de la Sorbonne). Pour une prĂ©sentation de ce chercheur de formation scientifique, sâintĂ©ressant aux interconnexions entre science, technologie et religion, voir : globalyoungacademy.net (rubrique members).
â François Ducos : Le vampire survient au crĂ©puscule. Cette prĂ©face de plus de quarante pages Ă©crite pour le livre de GĂ©rard DĂŽle, paru en 2013 : Dixie Horror Palace, Histoires de femmes vampires (Ăditions Terre de brume) discute de la littĂ©rature vampirique depuis ses dĂ©buts.
â Gilles Banderier : Les vampires. Aux origines du mythe (JĂ©rĂŽme Millon, 2015, 172 p.). Cette anthologie dâĂ©crits non littĂ©raires (manuscrits ou imprimĂ©s, de 1659 Ă 1773) propose vingt-deux textes importants pour lâhistoire du vampirisme, certains ne figurant peut-ĂȘtre nulle part ailleurs. Lâauteur est Docteur Ăšs-Lettres. Le catalogue de lâĂ©diteur contient plusieurs autres titres remarquables, notamment la premiĂšre traduction de lâĂ©dition de 1728 du traitĂ© de Ranft sur la mastication des morts.
â Jacques FinnĂ© et Jean Marigny : Dictionnaire des littĂ©ratures vampiriques (Terre de Brume, 2020, 334 p.).